La phrase. "Il n'y a aucune escroquerie dans cette affaire." Me Maurice Lantourne, l'avocat de Bernard Tapie, tous deux mis en examen pour escroquerie en bande organisée dans le dossier de l'arbitrage de la vente d'Adidas, a estimé lundi sur Europe 1 que cette affaire est "instrumentalisée". Une opinion partagée par Pierre Estoup, l'un des trois juges arbitres, lui aussi mis en examen qui a fait paraître un communiqué quelques heures auparavant.
Un dossier "vide". "Je suis sorti de garde à vue affligé par le fait qu'il n'y a rien dans le dossier qui justifie les qualifications" d'escroquerie en bande organisée, a jugé Me Lantourne sur Europe 1. "On instrumentalise le pénal pour essayer de trouver des pièces et on frappe très fort avec la qualification d'escroquerie en bande organisée qui est une qualification extrêmement grave pour essayer d'annuler la sentence arbitrale", a-t-il dénoncé.
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Une qualification "curieuse". Une opinion partagée par l'ancien haut magistrat Pierre Estoup, membre du tribunal arbitral en 2008. Dans un communiqué, ses avocats estiment que le dossier de l'instruction est "vide de toute infraction". "Il n'existe aucun des éléments légalement requis pour constituer le délit d'escroquerie", continuent-ils et qualifient de "curieuse" la qualification d'escroquerie, relevant qu'elle "ne s'accompagne à ce jour d'aucune incrimination de recel".
Des arbitres "intègres". L'avocat et le juge s'accordent également sur l'indépendance du juge Estoup, mise en cause dans l'enquête. Pour Me Lantourne, les trois arbitres qui ont participé au dossier sont des personnalités "indépendant[e]s, intègres, indiscutables". Pour l'avocat de Bernard Tapie, le fait qu'il connaissait Pierre Estoup auparavant "n'est pas un critère". Ce qui est important à ses yeux, "c'est l'indépendance".
"Indépendance" et "impartialité". Même son de cloche, une nouvelle fois, du côté du magistrat. "Comme chacun des arbitres, M. Pierre Estoup a estimé en son âme et conscience, ainsi qu'il l'a fait durant toute sa carrière de magistrat, qu'aucun événement passé ou présent, quelle qu'en soit la nature, n'était susceptible ni d'altérer son indépendance, ni de préjudicier à son impartialité", affirment ses avocats. "Si tel n'avait pas été le cas, il aurait alors refusé cet arbitrage dans le strict respect des règles alors applicables", poursuivent-ils.
"Vous imaginez Sarkozy appeler les arbitres ?" Quant au choix de l'arbitrage, Me Lantourne a dédouané l'ancien chef de l'Etat, Nicolas Sazkozy, et son gouvernement. "La société CDR propose un arbitrage. Le gouvernement, par ses représentants, n'a qu'un droit de véto. Au plus, vous pourriez dire qu'il ne s'est pas opposé à l'arbitrage", a-t-il affirmé. Et les 400 millions d'euros accordés à l'homme d'affaires à l'issue de la procédure, ils n'ont pas non plus été fixés à l'Elysée. "Vous imaginez le Président de la République dire 'il faut donner 403 millions', et appeler les trois arbitres ? C'est ridicule !", s'est-il exclamé.
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"L'exécution de Bernard Tapie". Me Lantourne dénonce donc une volonté de "tuer" politiquement son client. Cette procédure vise à "s'attaquer au symbole Bernard Tapie",juge-t-il. "L'affaire d'Etat c'est l'exécution de Bernard Tapie", ajoute l'avocat.
"Peyrelevade crée le scandale". Et le conseil de l'homme d'affaires a notamment Jean Peyrelevade, l'ancien PDG du Crédit Lyonnais, dans sa ligne de mire. "Le scandale c'est lui qui l'a créé. Il exécute Bernard Tapie pour des raisons politiques", accuse-t-il. Pour Me Lantourne, Jean Peyrelevade a "créé le scandale" en 1994 pour "le rendre inéligible" et l'empêcher de se présenter aux municipales à Marseille.