La loi sur le service minimum dans l'aérien a du plomb dans l'aile avant même d'être adoptée. Cette loi, qui doit définitivement être votée à l'Assemblée mercredi matin, est compromise dans la pratique par l'accord passé entre la direction et les pilotes et que Libération dévoile mardi.
En effet, la loi prévoit que les grévistes se déclarent 48 heures à l'avance afin que la compagnie, détenue à 15% par l'Etat, puisse prévoir le trafic et prévenir les passagers, et limiter les perturbations en mobilisant les non-grévistes pour assurer les principaux vols.
Un accord pour un "planning stable"
Or l'accord passé entre la direction et le syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) ne va pas dans la même direction. Selon le fac-similé de "l'accord relatif à la stabilité planning du personnel navigant technique" dévoilé par le quotidien, il est prévu que "le planning est stable à compter du constat d'élaboration, en toutes circonstances et en toutes périodes, et ce sans exception".
Surtout, "toutes modifications de planning, après le constat d'élaboration, doit faire l'objet d'un accord entre la compagnie et le navigant concerné". En clair, chaque pilote contacté pourra refuser de remplacer au pied levé un collègue gréviste.
"Le gouvernement est furieux"
Cet accord a agacé Thierry Mariani. Contacté par Libération, le ministre des Transports a d'abord jugé que l'objectif principal de la loi – prévoir le trafic –, n'était pas remis en cause. Mais il a fustigé "l'acharnement" de "certains syndicats" qui, selon lui, "montre qu'ils n'ont pas compris la situation préoccupante de leur compagnie".
Un connaisseur du dossier cité par Libération assure que "le gouvernement est furieux contre Air France", tandis qu'un salarié de la compagnie française juge l'accord "préférable", tout en estimant qu'il est "gagnant-gagnant".
"Préserver un minimum de stabilité"
Air France s'est défendu de porter atteinte à la loi sur le service minimum, estimant que "cette clarification ne porte atteinte à aucun des avantages dont bénéficieront nos passagers avec la future loi Diard".
Le SNPL a aussi confirmé cet accord. "Nous sommes convenus d'un accord de portée générale, pas seulement pour les périodes de grève, rétablissant ce qui existe dans d'autres compagnies aériennes, pour préserver un minimum de stabilité, de vie privée et familiale", a indiqué Louis Jobard, porte-parole du SNPL d'Air France.
En période de grève, la direction ne pourra réaffecter à sa guise les pilotes en congés, non déclarés comme grévistes, "et les transformer en briseurs de grève" contre leur gré, s'est réjoui le porte-parole.