Sept heures et demie d'audition au pôle santé publique du tribunal de grande instance de Paris. Au sortir du palais de justice, Martine Aubry a annoncé elle-même mardi soir sa mise en examen aux chefs "d'homicides et blessures involontaires" dans le cadre de l'instruction sur le dossier de l'amiante.
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Requête en annulation dès mercredi
Une décision qu'elle a tout de suite contestée, accompagnée de son avocat, Me Yves Baudelot, avant de déposer mercredi une requête en annulation de sa mise en examen, estimant que la justice faisait "fausse route". "Mon avocat déposera une demande en annulation de cette mise en examen comme d'ailleurs d'autres fonctionnaires l'ont fait avant moi", avait-elle annoncé mardi soir, jugeant que "rien ne sert de trouver des boucs émissaires, ce ne seront que de faux espoirs qui, demain, entraineront des désillusions qui s'ajouteront encore aux souffrances et aux douleurs des victimes" .
Son avocat, Me Yves Baudelot, a pour sa part regretté que le seul objectif de cette audition "était de mettre en examen". "Les explications que nous avons données ont été extrêmement détaillées et on a eu le sentiment que rien ne passait. Quels que soient les arguments qui étaient apportés, rien n'y a fait, rien n'a été entendu ", a confié l'avocat au micro d'Europe 1. Sur la requête en annulation, le conseil a confié avoir "fort bon espoir qu'elle aboutisse à un résultat positif".
"Aucun expert ne le demandait"
Dans ce dossier, l'enquête sur l'exposition à l'amiante de travailleurs de l'usine Fereo-Valeo de Condé-sur-Noireau, dans le Calvados, Martine Aubry est poursuivie en sa qualité d'ancienne directrice des relations du travail (DRT) du ministère du Travail entre avril 1984 et septembre 1987. La juge d'instruction Bertella-Geffroy estime qu'elle n'aurait pas pris les mesures qui auraient permis d'éviter les conséquences dramatiques de cette exposition.
Une position que Martine Aubry a rejetée avec vigueur au micro d'Europe 1 : "comment aurions-nous pu, entre 1984 et 1987, interdire l'amiante alors qu'aucun pays au monde ne l'avait fait, alors qu'aucune alerte scientifique, aucun expert, aucun syndicat, ne le demandait et alors que la France ne l'a interdit que neuf ans plus tard et l'Europe vingt ans plus tard ?", a demandé la maire de Lille.
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Un dossier comparable à l'hormone de croissance ?
Se disant "extrêmement sensible à la douleur des victimes", Me Yves Baudelot a comparé le dossier de l'amiante, "un drame terrible", à celui de l'hormone de croissance, qui fut également instruit par la juge Bertella-Geffroy . Dans ce dossier, "on a fait croire à ces gens qui avaient souffert de façon horrible que la justice pourrait leur donner un peu d'apaisement et une satisfaction.Tous les prévenus qui ont été mis en examen par madame Bertella-Geffroy ont été relaxés", a-t-il déploré. "Cela a été une désillusion terrible pour les intéressés et je pense que nous allons exactement dans le même chemin", a conclu l'avocat.