INTERVIEW E1 - "C'est un jour sombre pour la laïcité. Babyloup nous avait apporté beaucoup d'espoir sur une laïcité devenue moribonde. C'est un sentiment, presque, de deuil. Je dis les mots très forts. J'ai écrit 'Ma République se meurt', j'ai l'impression qu'hier elle est morte", a vivement réagi mercredi Jeannette Bougrab, ancienne présidente de la Halde, au sujet de la décision de la Cour de Cassation sur la crèche Babyloup. Celle-ci a annulé mardi le licenciement en 2008 d'une employée de la crèche privée des Yvelines, qui s'était vue reprocher par son employeur de refuser d'ôter son voile islamique.
Pour Jeannette Bougrab, cette décision risque d'entraîner de nombreuses revendications sur le port du voile, au nom de la liberté de conscience. "C'est un impact sur toutes les personnes morales de droit privé, associations ou entreprises. Elles doivent revoir leurs règlements intérieurs, certaines d'entre elles risquent d'être condamnées au pénal, ce n'est pas rien", s'inquiète-t-elle. Et d'enchaîner : "on doit reculer, fermer, devant la pression de ceux qui défendent une lecture très dure de la religion."
"Je rappelle que la laïcité est un principe constitutionnel, inscrit dès le premier article de la Constitution", conclut-elle enfin. "On ne comprend pas pourquoi la laïcité ne peut pas rentrer dans les entreprises et les associations. Il y a un souci : il y a des lieux où elle ne s'appliquerait pas, comme l'égalité homme-femme. C'est inquiétant."