3'CHRONO - L'idée émane deux députés opposés, mais ne séduit pas tout le monde.
La proposition. Les bacheliers en herbe seront-ils un jour également entrepreneurs en herbe ? Deux députés - le socialiste Fabrice Verdier (Gard) et l’UMP Jean-Charles Taugourdeau (Maine-et-Loire) - viennent en tout cas de proposer de créer une option "création d'entreprise" au baccalauréat, dans un rapport rendu jeudi soir à la Commission d’évaluation et de contrôle des politiques publiques. "Aujourd'hui, il y a des options 'pêche' ou 'langues mortes'. Pourquoi ne pas en créer une qui donnerait l'envie d'entreprendre", a défendu Fabrice Verdier, vendredi sur Europe 1. "On est un pays ou les jeunes fourmillent d'idées. Or il y a une certaine défiance vis-à-vis des entreprises. L'idée est de rapprocher le monde de l'entreprise et les jeunes, à savoir ceux qui créeront des emplois demain", a-t-il développé.
>> À quoi pourrait ressembler cette matière ? Qui est pour ? Qui est contre ? On vous explique en trois minutes chrono.
Une option sous quelle forme ? "Il ne s'agit pas de savoir créer une entreprise après le bac mais d'apporter un regard sur la vie de l'entreprise", précise le député socialiste. Droit, gestion, communication, commercialisation, comptabilité, ressources humaines ou encore le marketing pourraient ainsi être autant de chapitres étudiés tout au long de l'année d'un bachelier en herbe, détaillent les deux députés. "On peut ensuite imaginer la mise en place d'une simulation de création d'entreprise, avec l'intervention d'acteurs professionnels pendant les cours et dans le jury, sous la supervision des professeurs", poursuit Jean-Charles Taugourdeau, contacté par Europe1.fr.
"L'entreprenariat n'est pas assez présent"… "Nous appuyons évidemment cette idée, l'entrepreneuriat n'est pas assez présent dans l'Education", estime le réseau d'entrepreneurs Croissance +, contacté par Europe1.fr. Ce dernier propose d'ailleurs depuis longtemps une mesure similaire, applicable notamment aux bacs "économique et sociale" (ES) et professionnels : "il faut intégrer beaucoup plus de témoignages d'entrepreneurs dans les manuels scolaires et dans les cours. Ils viendraient partager leurs expériences réussies, mais aussi les leçons tirées de leurs échecs. Aujourd'hui, créer une entreprise paraît infaisable pour les jeunes. Il faut leur expliquer que c'est possible".
Les enseignants dubitatifs. "C'est une idée surréaliste", estime pour sa part Daniel Robin, co-secrétaire du SNES, premier syndicat des enseignants du secondaire, contacté par Europe1.fr. "La création d'entreprise ne relève pas d'une formation au baccalauréat et de ses exigences, c'est hors objet, ce n'est pas le niveau", tacle-t-il, craignant que l'on "ne mobilise trop de forces pour une option qui ne doit pas être le cœur de compétence d'un jeune bachelier".
Une utopie ? Au-delà des réticences sur le fond, le chemin devrait être encore long avant que l'idée ne se concrétise. "Je doute malheureusement que cette idée voit le jour tout de suite", avance-t-on ainsi du côté de Croissance +. D'ailleurs, interrogé par Europe1.fr, le ministère de l'Education indique, lui, que la création d'une telle option "n'est pas à l'ordre du jour". Mais le rapport annexé au projet de loi sur la refondation de l'école prévoit bien d'approfondir la découverte du monde professionnel dès le collège, souligne le ministère. Mais les deux députés auteurs du texte, eux, insistent sur l'urgence d'une telle mesure et entendent bien se faire entendre du gouvernement. "Le rapport sera envoyé au ministère de l'Education et nous aborderons la question lors du débat à l'Assemblée de la loi sur la refondation de l'école", indique Jean-Charles Taugourdeau. Et de conclure : "en France, plus on parle de choses, moins on les fait. Il serait temps d'inverser la vapeur. Le combat pour l'emploi doit se faire à tous les niveaux."