Actualité oblige, le livre de Tristane Banon semblait promis à un beau succès de librairie. Las, malgré la couverture médiatique, les ventes du Bal des hypocrites, signé par celle qui accuse Dominique Strauss-Kahn d’agression sexuelle, ne se vend pas bien. L’ouvrage, sorti le 13 octobre dernier, a pourtant bénéficié d’un très gros tirage, de près de 40.000 exemplaires, sur la base du degré d’attente calculé par la distribution. "Cette attente est un peu déçue aujourd’hui", reconnaît pour Europe1.fr Marion Mazauric, directrice et fondatrice du Diable Vauvert, la maison d’édition qui a imprimé le livre.
"Pas catastrophique, mais timide"
Le Pôle éditions d’Ipsos indique que 2.300 exemplaires du livre ont été vendus depuis sa sortie. Un chiffre qualifié de "petit départ" par l’institut. Selon Datalib, qui recense les ventes de livres dans les libraires indépendantes, Le Bal des hypocrites se classe à la 14e place du palmarès des sept derniers jours dans la catégorie Essais et documents. Forcément décevant.
Au siège de Virgin Megastore France, on indique que sur les 800 exemplaires commandés, seuls 116 ont trouvé preneur mardi après-midi. Soit moins de 15% du stock. "L’effet est déjà retombé, les ventes sont en train de stagner, voire de baisser", indique le service communication du grand distributeur, où l’on impute cet échec relatif à l’actualité. "Le non-lieu au bénéfice de Dominique Strauss-Kahn est tombé le même jour que la mise en place du livre en magasin", rappelle-t-on.
Du côté de la Fnac, pas de chiffres, mais on évoque un démarrage "pas catastrophique, mais timide tout de même", surtout "par rapport au battage médiatique". D’autant, précisent les magasins de biens culturels, que le succès de ce genre d’ouvrages, à l’inverse des romans, se jauge souvent à l’aune des ventes des premiers jours.
"Enormément de courriers de lecteur"
Au Diable Vauvert, on relativise ce semi-échec. "Le livre vient de sortir, on ne juge pas en quelques jours", tempère Marion Mazauric, qui s’amuse que sa maison d’édition "soit vraiment observée de près dans cette affaire". Pour l’éditrice, "l’actualité a détourné les lecteurs potentiels du livre. Comme la presse est très présente, on a l’impression que Tristane Banon a beaucoup parlé, alors qu’elle ne s’est finalement que très peu exprimée."
Et puis, affirme Marion Mazauric, les retours sont excellents. "On a énormément de courriers de lecteur, plus de cinq lettres par jour", assure-t-elle. "Ce sont des lecteurs d’un peu partout, qui nous expriment leur soutien, voire des femmes qui ont été abusées sexuellement et qui nous remercient", précise l’éditrice.
Une éditrice qui continue de défendre le livre avec ferveur. "Evidemment, il y a un risque de retours d'invendus, mais on a confiance, car c’est un livre très, très fort, très beau, bouleversant", affirme encore Marion Mazauric. "On comprend tout, on comprend pourquoi Tristane Banon ne voulait pas parler, on comprend finalement pourquoi elle y est allé en craignant ce qui est arrivé. On voit ce que c’est que d’être victime d’une violence sexuelle, et d’être clouée au pilori médiatique. Etre une partie de l’affaire DSK, ce n’est pas un cadeau", soupire l’éditrice, qui conclut : "Quand on l’a lu, on se dit : 'c’est un bouquin qui va rester'."