Dans l'affaire du Carlton à Lille et dans l'affaire Diallo à New-York, l'ancien patron du FMI Dominique Strauss-Kahn devra face mercredi à deux fronts judiciaires de part et d'autre de l'Atlantique : l'un au pénal en France, l'autre au civil aux Etats-Unis.
Récemment, au terme de deux journées et une nuit de garde à vue dans une caserne de gendarmerie à Lille, Dominique Strauss-Kahn s'était vu délivrer une convocation "aux fins de mise en examen" pour "complicité de proxénétisme aggravé en bande organisée" et "recel d'abus de biens sociaux". Des infractions passibles de vingt ans de réclusion criminelle et cinq ans d'emprisonnement.
Le juge plaide pour un accord à l'amiable
A New-York, se tiendra devant la Cour suprême du Bronx la première audience civile dans l'affaire du Sofitel où DSK est accusé d'agression sexuelle par la femme de chambre Nafissatou Diallo, dans laquelle les poursuites pénales ont été abandonnées. Le juge Douglas McKeon présidera une audience sur la motion des avocats de Dominique Strauss-Kahn, qui affirment que l'ancien directeur général du FMI ne peut être poursuivi au civil car il bénéficiait au moment des faits d'une immunité diplomatique totale. Ni l'ancien ministre socialiste, ni Nafissatou Diallo ne seront présents lors de cette audience.
Dans une interview au Journal du Dimanche, ce juge plaide pour un accord à l'amiable qui est, selon lui, trouvé "dans près de 90% des quelque 25.000 dossiers que le tribunal du Bronx examine chaque année"."Nous n'avons pas le choix parce qu'on gère des milliers de dossiers. Nous n'avons ni la capacité, ni le personnel nécessaire pour aller systématiquement au procès", a-t-il ajouté à Europe 1.
S'il décide que l'ex-patron du FMI, "c'est la fin de l'affaire" selon ses termes. Si, à l'inverse, il retient les arguments des avocats de Nafissatou Diallo, selon lesquels DSK ne peut prétendre à cette immunité diplomatique, il devra ensuite se prononcer sur d'autres motions : notamment celle des avocats de l'ancien ministre pour que soit retiré un paragraphe de la plainte de Nafissatou Diallo évoquant d'autres agressions sexuelles présumées.
Contactée par le JDD, Nafissatou Diallo espère pouvoir reprendre une vie normale car aujourd'hui "elle se lamente de "ses journées sans but, sans ce travail du Sofitel" qu’elle aimait tant". Elle a suivi "des séances de rééducation pour son épaule" qu’elle dit douloureuse depuis l’agression. "J’ai vu beaucoup de médecins et je devrai subir une intervention."
"Présentées par des responsables policiers"
A Lille, le même jour, les magistrats, qui instruisent l'affaire de proxénétisme dite du Carlton, cherchent notamment à déterminer si l'ancien directeur général du Fonds monétaire international savait que les participantes à des soirées libertines auxquelles il avait pris part, notamment à Paris et Washington, étaient rémunérées.
Certaines d'entre elles ont soutenu qu'il ne pouvait l'ignorer ou qu'il le savait, ce que DSK a réfuté lors de sa garde à vue, a-t-on affirmé de source proche du dossier. Si certains protagonistes ont soutenu qu'il n'était pas au courant, d'autres éléments laisseraient penser le contraire, à l'instar d'un SMS qu'aurait envoyé DSK à l'un de ses proches en lui recommandant une de ses partenaires. DSK a soutenu devant les enquêteurs qu'il ne pouvait imaginer que ces jeunes femmes puissent être des prostituées car certaines "lui ont été présentées par des responsables policiers", selon une source proche de l'enquête. Me Frédérique Baulieu, conseil de DSK, avait affirmé que son client était "parfaitement satisfait d'avoir été entendu dans des conditions de grande sérénité" et "s'est complètement expliqué sur l'ensemble des faits pour lesquels il a été interrogé" lors de sa garde à vue.
Si les juges estimaient que DSK connaissait l'origine frauduleuse de ces dépenses, il pourrait être poursuivi pour recel d'abus de biens sociaux. Le dernier de ces voyages a eu lieu du 11 au 13 mai 2011 dans la capitale américaine, à la veille de l'arrestation de DSK à New York.