Nous sommes à Saint-Quentin-sur-Charente, en plein Poitou-Charentes. Là, Ludovic exploite 90 hectares d’un terrain lunaire, touché de plein fouet par la sécheresse et dépouillé de son herbe. Pour continuer à nourrir ses 80 vaches laitières, l’agriculteur s’est vu dans l’obligation de destocker les fourrages destinés à l’alimentation des animaux l’hiver.
Mais cette solution n’est pas suffisante, et les vaches de Ludovic seront bientôt à la diète. Alors, comme ultime recours, l’exploitant a décidé de publier la petite annonce suivante sur le site Internet leboncoin.fr : "Cherche foin pour nourri cheptel, cause sécheresse".
Sur la toile, c’est la foire d’empoigne
Résultat : des offres décevantes et basées sur le principe de la spéculation.
"Soit c’est des prix déraisonnables, soit c’est trop loin en termes de kilomètres", résume Sylvie, la femme de Ludovic.
"On ne cherche pas la pitié"
"On ne cherche pas de la pitié, ou qu’on nous offre du foin, mais seulement à acheter du foin, à un prix juste", explique l’agricultrice.
Les produits sont disponibles. Mais la surenchère est telle que les agriculteurs, même s’ils sont soucieux de la survie de leurs bêtes, abandonnent l’idée d’acheter du foin sur Internet. "On a trouvé du foin, mais on ne nous l’a pas laissé, parce qu’une personne a surenchéri dessus. Les gens deviennent déraisonnables. Ils proposent du foin, mais à un prix faramineux", se désole ainsi Sylvie.
"Tout le monde a peur, c’est normal. C’est maintenant qu’il faut s’en inquiéter, après ce sera trop tard", avertit plus loin l’agricultrice.
Des réseaux solidaires
Pour couper court à cette spéculation sans fin, le premier syndicat agricole, la FNSEA, a mis en place une cellule de crise pour mettre en relation éleveurs et céréaliers. Selon la FNSEA, le seuil fatidique est de 120 euros la tonne. Au dessus de cette somme, l'achat de la paille n'est plus viable pour beaucoup d'éleveurs.
La SNCF, elle, a accepté de transporter du foin gratuitement, par voie ferroviaire.
Une autre idée suit son chemin : certains éleveurs ont ainsi proposé de puiser dans les stocks de blé servant à la fabrication de carburants.