L’INFO. L’auteur de la tuerie de Chevaline n’était pas seul. C’est la thèse défendue dans une enquête diffusée lundi soir sur la télévision publique britannique BBC, portant sur ce drame qui a fait quatre morts en septembre 2012 dans les Alpes françaises. Le magazine d'actualité Panorama, une émission emblématique de la BBC, a par ailleurs proposé la première interview du frère de Saad al-Hilli, l'une des victimes de la tuerie, qui clame son innocence.
>> Le teaser de l'enquête de la BBC one :
Les faits. Le 5 septembre 2012, Saad al-Hilli, Britannique d'origine irakienne de 50 ans, avait été tué de plusieurs balles dans la tête avec sa femme et sa belle-mère au cours de leurs vacances sur les bords du lac d'Annecy. Un cycliste de la région, probable victime collatérale, avait également été abattu. Les deux filles du couple al-Hilli avaient survécu à la tuerie, l'une d'elle étant blessée.
L’enquête judiciaire. La piste familiale semblait privilégiée depuis l'interpellation, près de Londres en juin, du frère de Saad al-Hilli, Zaïd. Mais l’homme avait été relâché, faute de preuves. Pour les enquêteurs, le mobile de la tuerie aurait pu être le désaccord autour d'un héritage familial portant sur plusieurs millions d'euros. Le procureur d'Annecy avait évoqué début septembre une nouvelle piste, celle de l'espionnage industriel, car le père de famille était un ingénieur travaillant pour une société de satellites civils.
La thèse de la BBC : un tueur à moto, un complice en 4X4. Dans l'enquête de la BBC, deux témoins clés racontent avoir vu un motard et un 4X4 BMW X5 à proximité des lieux du crime. Brett Martin, le cycliste britannique qui avait découvert les corps au bout d'une petite route forestière, a expliqué avoir croisé un motard au moment où il arrivait sur les lieux. Un garde-forestier français a de son côté témoigné avoir vu un motard tout de noir vêtu se diriger vers le parking où la famille Hilli a été tuée. Au terme de son enquête, la BBC désigne ce motard comme l'auteur présumé de la tuerie mais précise que les deux témoins ont également signalé la présence d'une BMW X5 grise, avec volant à droite, conduite par un homme "légèrement chauve et à la peau sombre". Pour la BBC, il s'agirait d'un complice qui aurait fui vers l'Italie voisine immédiatement après la tuerie.
Un portrait robot bientôt diffusé. Un portrait robot du motard aperçu par des témoins sur la scène du quadruple meurtre de Chevaline va être diffusé dans les prochains jours, a fait savoir mardi le procureur de la République d'Annecy, confirmant une information du Dauphiné Libéré. Le portrait de cet homme portant un casque et une barbe est en possession des enquêteurs depuis le début de l'enquête, mais il n'avait pas été diffusé pour "des raisons stratégiques", a indiqué Eric Maillaud. "Nous ne voulions pas que cette personne soit amenée à se dissimuler", a expliqué le procureur au lendemain de la diffusion de l'émission de la BBC.
Zaïd al-Hilli charge la gendarmerie française… Dans son interview, Zaïd al-Hilli a de son côté accusé la gendarmerie française de ne pas avoir suffisamment creusé sur l'hypothèse selon laquelle la véritable cible des tueurs était Sylvain Mollier. Le cycliste français a été retrouvé mort à proximité des autres corps. "Ils couvrent quelqu'un en France dans cette région et ils le savent", a affirmé à la BBC le frère du père de famille assassiné, qui doit être à nouveau entendu mercredi par la police. "Mollier était impliqué dans des disputes familiales et était un étranger pour sa riche famille", explique Zaïd al-Hilli pour qui la piste locale doit être suivie.
…et le procureur déplore l’attitude du frère. Le procureur d'Annecy, Eric Maillaud, a pour sa part affirmé à la BBC que Mollier, qui travaillait pour une filiale du groupe nucléaire français Areva, était simplement au mauvais endroit au mauvais moment. Lundi, le procureur a déploré le manque de collaboration de Zaïd al-Hilli avec les enquêteurs. "S'il s'était constitué partie civile, il aurait pu connaître le dossier et se rendre compte que les enquêteurs avaient fait le maximum pour explorer la piste Sylvain Mollier, mais qu'elle ne donne rien", a fait remarquer le procureur Maillaud.
Zaïd al-Hilli a admis que son frère et lui étaient en conflit au sujet de l'héritage de leur père mais a nié avoir orchestré la tuerie. Ayant déjà été questionné pendant 25 heures par la police bitannique, Zaïd al-Hilli refuse de se rendre en France pour de nouveaux interrogatoires: "Les Français, je ne leur fais pas du tout confiance".