A-t-il franchi la ligne jaune ? Philippe Courroye, le procureur de Nanterre,a été mis en examen, mardi, dans le cadre de l’enquête sur la violation présumée des sources de deux journalistes du Monde. Celui qui était auparavant considéré comme un modèle d’indépendance a vu sa réputation minée par sa proximité avec le pouvoir et par l’affaire Bettencourt. Philippe Courroye, 52 ans, n’a jamais caché sa proximité avec Nicolas Sarkozy, mais a toujours rejeté l’idée qu’il puisse être asservi au pouvoir.
Des méthodes critiquées
Dans les années 1990, ce jeune juge d’instruction a réussi à se faire connaître en faisant tomber deux maires RPR, Michel Noir à Lyon et Alain Carignon à Grenoble. Devenu l’incarnation des enquêtes sur les milieux politiques, il a intégré le pôle financier de Paris. Là, il a mené une enquête sur des ventes d’armes à l’Angola qui a débouché en 2009 sur la condamnation du fils aîné de François Mitterrand, Jean-Christophe.
Autre fait d’armes, il a fait arrêter, par son enquête, Charles Pieri, chef présumé des clandestins armés corses. Respecté par ses collègues et considéré comme l'un des magistrats les plus brillants de sa génération, il était pourtant déjà critiqué à l’époque pour ses méthodes jugées brutales et son usage de la garde à vue et de la détention provisoire.
Guerre contre Prévost-Déprez
Sa nomination en 2007 comme procureur de Nanterre, contre l’avis du Conseil supérieur de la magistrature, a marqué un tournant. Certains ont alors douté de l’impartialité de son non-lieu dans l’affaire des "frais de bouche" de Jacques Chirac. En cause : un repas partagé avec les Chirac en 2008 dans le Var, qui a suscité les soupçons du Syndicat de la magistrature.
Avec l’affaire Bettencourt, cet admirateur de Napoléon a vu sa réputation s’effondrer. Sa guerre avec la présidente du tribunal de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez, a sérieusement écorné son prestige : c’est en voulant exposer les liens entre la magistrate et la presse qu’il aurait lancé des policiers sur la piste de journalistes.