L'INFO. Dans une vidéo postée sur YouTube fin février, trois détenus du centre pénitentiaire de Lannemezan, dans les Hautes-Pyrénées, s'exhibent avec plusieurs grands couteaux. Une vidéo qui inquiète le personnel surveillant alors même qu'un gardien a été violemment agressé par un détenu lundi. Les syndicats dénoncent des conditions de travail de plus en plus difficiles et un contexte tendu entre les murs de la centrale.
Les menaces en format "clash". Dans ces vidéos, qu'Europe1.fr a pu visionner mais que nous avons choisi de ne pas publier, les trois détenus, le visage à peine dissimulé dernière des lunettes noires, se vantent d'être incarcérés "à Lannemezan, dans une des centrales les plus sécuritaires de France".
A l'instar de célèbres rappeurs, ils répondent sur le mode du "clash" à des provocations de prisonniers incarcérés dans d'autres établissement. Mais ici, pas de rimes ni de musiques ponctuées de grosses lignes de basse. Reste le langage fleuri et des menaces de représailles, le tout, armé de grosses lames en forme de fabrication visiblement artisanale. De source syndicale, les trois auteurs de ce huis clos carcéral ont été depuis placés à l'isolement et les armes retrouvées mardi dans un blouson, selon la Dépêche, qui révèle l'affaire mercredi. Le parquet de Tarbes s'est saisi du dossier.
Comment est-ce possible ? Le représentant local du syndicat de surveillants SNP-FO, Jean-Claude Vigneau, contacté par Europe1.fr, confie que si les gardiens s'inquiètent devant ces images, ils ne sont pas pour autant surpris. Le syndicaliste dénonce un manque de moyens dans la lutte contre le phénomène des téléphones portables, qui sont interdits en prison, notamment par un régime de fouilles limité depuis 2009. "Toutes les centrales connaissent ce genre de problème et on se souvient notamment des vidéos postées par Youssouf Fofana depuis Clairvaux en 2012".
D'où viennent les lames ? "Elles ont très probablement été fabriquées dans l'établissement, à l'atelier chaudronnerie. Le problème c'est que les détenus passent par un portique de sécurité pour les empêcher de faire passer du matériel. Celui-ci était peut-être défaillant", explique le syndicaliste qui réclame désormais une fouille générale de tout l'établissement et espère, sans trop y croire, l'utilisation de scanners corporels.
Des conditions de travail qui se dégradent. A l'intérieur de la centrale, le climat est "très tendu", confie Jean-Claude Vigneau. Une situation accentuée par l'agression, sans lien avec l'affaire des vidéos cependant, d'un surveillant lundi dernier. Cet agent a eu la mâchoire fracturée par un détenu alors qu'il tentait de le maîtriser au cours d'une altercation, le quatrième incident de ce type depuis un an. "Avec 146 détenus, nous avons trop de monde à la centrale. Ce n'est pas tenable", regrette le syndicaliste.
"Quand on voit ces couteaux, certains collègues ont peur d'aller travailler sur la coursive", poursuit-il. Une peur compréhensible à la lumière d'un triste précédent à Lannemezan. Deux détenus avaient égorgé un de leurs semblables en février 2009, à l'aide d'un sabre de fabrication artisanale. L'un a été condamné à 30 de réclusion, l'autre à la perpétuité.