Ils sont pris entre le marteau et l'enclume. D'un côté, le rectorat qui leur demande d'assister à 15 jours de formation, obligatoire pour être titularisés. De l'autre, leurs chefs d'établissement qui ne veulent pas les voir partir et laisser leur classe sans enseignant pendant deux semaines. Des professeurs stagiaires dénoncent la situation inextricable dans laquelle les place la réforme de la formation des enseignants.
60 heures de formation perdues
Exemple dans l'académie de Clermont-Ferrand. Pauline enseigne à plein temps auprès de quatre classes. Depuis la rentrée de septembre, elle a assisté à huit jours de formation seulement. Elle devait retourner à l'IUFM cette semaine mais, faute de remplaçant, son proviseur refuse de la libérer. La jeune professeur risque de perdre 60 heures de formation qu'elle estime pourtant indispensables.
"On se sent méprisés dans notre fonction d'enseignant" :
Ce qui agace le plus la jeune femme, c'est que cette formation était prévue depuis longtemps et que son établissement aurait pu anticiper son absence. "Nous, on a envie de travailler dans l'intérêt des élèves et je sais que l'intérêt des élèves, c'est que je bénéficie de cette formation", explique Pauline, interrogée par Europe 1.
Le constat est le même à Strasbourg, où les enseignants stagiaires devaient partir quinze jours en janvier et quinze jours en mars. Mais le SNES a affirmé mercredi que, faute de remplaçants, le recteur a préféré annuler ces formations.
Des stagiaires qui "s’auto-remplacent"
Dans le sud, la situation est la même. A Béziers, des professeurs ont fait front en octobre dernier pour permettre à une de leur collègue stagiaire de pouvoir assister à sa formation, raconte Midi Libre. Mais ce mois-ci, la jeune femme pourrait bien être obligée de "s'auto-remplacer", dénoncent les autres professeurs.
Depuis la rentrée, nombreux sont les enseignants stagiaires à dénoncer les conditions dans lesquelles ils travaillent. Sans formation pratique et à temps plein, ils peinent à s’en sortir. Certains d’entre eux ont d’ailleurs déjà rendu leur tablier.
Les proviseurs assument
Les chefs d'établissements refusent donc de laisser partir les stagiaires en formation, pour ne pas laisser les élèves sans professeur. C'est la consigne qu'a donné le principal syndicat des proviseurs, le SNPDEN.
“L’essentiel est que les élèves aient leurs heures de cours. Si le stage a lieu alors que le professeur a cours et qu’il n’est pas remplacé, la consigne est très simple, c’est celle de la continuité du service public, le professeur ne doit pas être autorisé à partir“, a déclaré son secrétaire général, Philippe Tournier.
Un début de remise en question
Selon les professeurs, titulaires et stagiaires, la réforme de la formation des enseignants est responsable de cette situation. Lors de ces vœux à la culture, Nicolas Sarkozy est revenu sur le problème. "Je pense qu’il faut que nous remettions sur le chantier les éléments de formation, passer des IUFM à l’université, passer d’un niveau licence à un niveau master ne suffit pas", a-t-il déclaré.
Au ministère, on explique néanmoins qu'il s'agit de problèmes ponctuels, très locaux. La plupart des académies ont en effet pris le parti d'organiser des formations filées, une demi-journée par semaine, tout au long de l'année.