Ils sont soupçonnés de s'être enrichis sur le dos de leurs patients, de la Sécurité sociale et des mutuelles. La fraude, qualifiée de "colossale", représenterait un préjudice chiffré entre 3,6 et 4,7 millions d'euros sur trois ans pour la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). Deux chirurgiens-dentistes, un père et son fils, pratiquant dans les quartiers Nord de Marseille, ont été présentés jeudi après-midi à un juge d'instruction, après une perquisition dans leurs locaux.
Une fraude juteuse…
Le fils, âgé de 32 ans, exerçait depuis sept ans. Il dégageait un chiffre d'affaires situé entre 1 et 1,2 million d'euros, lui permettant de s'offrir une Aston Martin de collection à 250.000 euros. Il faut dire que le jeune dentiste semble être un véritable "bourreau" de travail. Selon le colonel Jacques Diacono, chef de la Section de recherches de la gendarmerie de Marseille, "sur la base des actes déclarés, il travaillait jusqu'à 52 heures par jour" et recevait jusqu'à 70 patients en une seule journée.
Et pour cause : depuis 2008, les deux dentistes auraient pratiqué des soins sur des patients qui n'en avaient pas besoin, en allant jusqu'à falsifier des radios et la codification des actes. Un travail qualifié d'"abatage" par un enquêteur. De plus, ces interventions étaient facturées à un coût particulièrement élevé : pour une simple couronne, les patients devaient débourser 28 fois le prix moyen.
…aux dépens de victimes modestes
Et le plus triste dans cette affaire, c'est que les victimes de ces deux dentistes sont pour la plupart des patients aux revenus modestes, parfois sous le régime de la CMU, dont certains ont même été "mutilés". Pour une quinzaine d'entre eux, ces interventions frauduleuses ont entraîné des infirmités permanentes.
Face aux plaintes qui s'accumulaient, une vingtaine au total, la justice s'est donc saisie de l'affaire. La juge Annaïck Le Goff, déjà en charge du dossier des prothèses PIP, a décidé de retenir les qualifications de "violences volontaires ayant entraîné des mutilations ou des infirmités permanentes", "escroquerie au préjudice des organismes sociaux (CPAM, mutuelles et assurances)","complicité de faux en écriture privée et usage de faux " ainsi que blanchiment.
Présentés au juge jeudi en vue d'une mise en examen, le parquet a requis un mandat de dépôt à l'encontre des deux dentistes, soulignant "l'absence totale de scrupules" de leur part.
L'Aston Martin a quant à elle été saisie.