Ils sont vent debout contre ce fichage qu'ils jugent illégal. Après le refus de délivrance de leur passeport, cinq personnes, quatre Toulousains et un Varois, ont décidé d'assigner en justice le ministre de l'Intérieur sortant Claude Guéant. La raison ? Ces personnes n'ont pas accepté de livrer plus de deux empreintes digitales, nécessaires à la confection de leur passeport biométrique.
Et pourtant une décision du Conseil d'Etat impose au ministère de l'Intérieur de ne prélever que les deux empreintes obligatoires (les deux index) et non pas huit (tous les doigts sauf le pouce) comme cela était réclamé. La justice se prononcera le 5 juin prochain. Mais avant même de se prononcer sur le fond de la demande, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, Jacques Gondran de Robert, devra déterminer s'il est compétent pour trancher ce litige. Et pour cause, mardi, l'avocat représentant le ministre de l'Intérieur a en effet soulevé l'incompétence de la justice judiciaire au profit de la justice administrative.
Un nouveau décret au Journal officiel
Le Conseil d’Etat avait pourtant donné raison aux plaignants le 26 octobre 2011, en annulant l’article 5 du décret du 30 avril 2008, qui "prévoit la collecte de huit empreintes digitales alors que seules deux sont destinées à figurer dans le passeport". L’Etat s’est, par ailleurs, engagé à supprimer les empreintes surnuméraires déjà collectées pour l’établissement de 6,3 millions de passeports.
Après l’assignation en justice du ministère de l’Intérieur, un nouveau décret est paru au mois d'avril au Journal officiel, précisant que "seules deux empreintes digitales pourront être collectées et conservées".
"Obtenir la preuve que les empreintes ont été supprimées"
Mais les plaignants veulent savoir ce que le ministère va faire de ces six empreintes en trop. "Elles sont stockées dans un méga-fichier à côté de Reims. Mais pourquoi les garder alors qu'elles sont inutiles nous dit le Conseil d'Etat. Ce que l'on craint c'est la constitution d'un méga-fichier constitué de l'assemblage de plusieurs fichiers épars", affirme sur Europe 1 Me Christophe Lèguevagues, l'avocat de cinq plaignants.
Selon lui, "ce fichier de passeports biométriques" se rapproche "d'une autre interconnexion de fichiers qui a été mise en place par M. Guéant le 6 mai 2012". Il fait allusion au fichier des "gens honnêtes", censé lutter contre l'usurpation d'identité, qui a ensuite été censuré par le Conseil constitutionnel.
Du côté des plaignants la solution est simple : "ne pas prélever d'empreintes surnuméraires et se contenter de deux empreintes digitales comme le recommande le Conseil d'Etat" mais aussi "obtenir la preuve que les empreintes ont été supprimées", conclut Chistophe Lèguevagues qui assure que, pour l'instant, leurs doléances "n'ont pas été entendues".