Après une relative accalmie sur le plan politique, l'affaire Fillon-Jouyet est entré vendredi dans une phase judiciaire. L'ex-Premier ministre a demandé lors d'une audience en référé la copie intégrale de l'enregistrement de la conversation controversée entre les journalistes du Monde et le secrétaire général de l'Elysée ou, à défaut, les extraits concernant uniquement leur client et les propos qui lui sont allégués. Le tribunal de grande instance de Paris rendra sa décision jeudi.
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Devant le tribunal des référés, les avocats des deux journalistes du Monde, Gérard Davet et Fabrice Lhomme ont mis en avant le secret des sources et des dossiers des journalistes et estimé que la demande de François Fillon n'était pas légalement admissible. "Cette procédure judiciaire sert une stratégie médiatique", a dénoncé Me Christophe Bigot. Les journalistes ont affirmé qu'ils réservaient leur enregistrement à la justice. Ils peuvent le produire dans le cadre de leur offre de preuve dans un procès en diffamation. François Fillon cherche à "instrumentaliser" le tribunal et à s'affranchir des règles de la loi sur la presse, a encore fustigé Me Bigot. Une loi selon laquelle les prévenus sont les seuls à pouvoir choisir les pièces pour leur défense. Le secret des sources ne peut être rompu "qu'en cas d'impératif prépondérant d'intérêt public", a fait valoir Me François Saint-Pierre. La demande d'une personne privée ne constituera jamais un tel impératif, a-t-il plaidé.
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Mais pour Me Jean-Pierre Versini-Campinchi, l'un des avocats de François Fillon, les enregistrements en question ne relèvent plus du secret des sources dès lors que les deux journalistes ont "pulvérisé" leur propre source en faisant écouter l'enregistrement à d'autres médias (l'AFP et BFM TV ont notamment indiqué avoir pu écouter les bandes, ndlr). "Le secret des sources, c'est d'abord le devoir des journalistes", a-t-il dit vendredi soir. Or "c'est eux qui viennent brûler, carboniser leur source." Les défenseurs de l'ancien Premier ministre appuient leur requête sur un article du code de procédure civile qui prévoit qu'une personne peut demander en référé la production d'une pièce nécessaire à un procès avant de l'engager. Ils précisent envisager de poursuivre les journalistes du Monde pour "faute".
Une citation directe en diffamation visant les journalistes du Monde ainsi que le secrétaire général de l'Elysée sera par ailleurs déposée lundi ou mardi, a précisé Me Versini-Campinchi. Cette demande s'inscrit dans une autre perspective: celui d'une procédure au civil, pour faute, car François Fillon reproche aux journalistes d'avoir fait la promotion de leur livre à ses dépens.