Claude Guéant peut être satisfait. Le tribunal de grande instance de Paris a ordonné une nouvelle fois vendredi le blocage de Copwatch Nord-Ile-de-France. Le ministre de l'Intérieur, qui avait déjà obtenu gain de cause à l'automne, a "salué" la décision du tribunal.
A l'automne 2011, le site avait en effet déclenché un vif émoi chez les forces de l'ordre qui disaient craindre pour la vie de certains fonctionnaires. Œuvre d'un "collectif de citoyens souhaitant lutter par la transparence et l'information contre les violences policières", Copwatch-Nord-Ile-de-France publiait en effet des photos de policiers et de gendarmes, parfois leurs noms et leurs adresses personnelles. Interdit une première fois le 14 octobre 2011, le site de fichage des policiers avait été réactivé fin janvier.
Le blocage complet du site exigé
Comme en octobre 2011, le juge des référés du TGI de Paris a jugé vendredi le site "illicite", évoquant entre autres infractions "la diffusion de données à caractère personnel, ainsi qu'une atteinte caractérisée au droit à l'image des policiers".
Conséquence immédiate : il a exigé des fournisseurs d'accès à internet, les FAI, le blocage complet de l'adresse du site, et non celui de certaines pages, comme le demandait le ministre de l'Intérieur. Le tribunal a considéré en effet que ce filtrage partiel n'était pas assez efficace.
Dans son ordonnance, le juge Jacques Gondran de Robert demande donc à Free, France Telecom, SFR, Bouygues Telecom, Numéricable et Darty Telecom "de mettre en œuvre, directement ou indirectement, sans délai, (...) des mesures appropriées afin de tenter d'empêcher leurs abonnés respectifs situés sur le territoire français (...) d'accéder au site" litigieux. Le ministère de l'Intérieur devra "rembourser aux FAI les coûts afférents" à ces mesures.
Vers une action envers les créateurs du site ?
Dans un communiqué, Claude Guéant a salué cette "victoire pour l’ensemble des forces de sécurité dont l’honneur et la réputation ont été honteusement salis par des individus utilisant l’anonymat et le mensonge". Mais si le ministre de l'Intérieur a obtenu gain de cause pour le site principal, il n'a en revanche pas obtenu l'interdiction de 34 "sites miroirs", qui selon lui reproduisaient le contenu du site initial.
En effet, écrit le juge, "rien ne permet de vérifier que les éditeurs et les hébergeurs de ces 34 autres sites seraient les mêmes que ceux du site Copewatch-Nord-Ile-de-France qui n'a pu être identifié".
Le tribunal n'a pas non plus retenu "le blocage de sites futurs". Les FAI avaient vivement dénoncé cette requête. Ils s'étaient surtout relayés pour souligner l'inanité du blocage qui leur était imposé. "C'est un coup d'épée dans l'eau", avait ainsi argué l'un d'entre eux. "Ca n'empêchera pas la réitération du dommage car les hébergeurs et les éditeurs courent toujours", avait-il prévenu.
"Sans une action sérieuse envers les auteurs, le trouble continuera. Car quand on coupe une tête, il en repousse trois", avait-il ajouté. Même son de cloche du côté du secrétaire général d'Alliance, Jean-Claude Delage, a espéré que le ministère "arriverait à identifier les responsables de ce site. Auquel cas, nous porterons plainte contre eux". Interrogé en janvier dernier par Europe1.fr, Me Eolas avait rappelé qu'il était très facile d'identifier les créateurs du site. Si des poursuites sont engagées, ces derniers risquent jusqu’à 5 ans de prison et 300.000 euros d’amende pour "diffusion, sans autorisation préalable, de fichiers personnels".