L’info. L’aspartame se retrouve dans une bonne partie de nos aliments, pourtant, ses effets sur la santé restent méconnus et font l’objet d’un vif débat depuis des années. L’Union européenne a donc demandé à l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) de faire le point sur la question. Ses conclusions, rendues publiques mardi, indiquent que cet édulcorant ne présente pas de risques sanitaires dans son utilisation actuelle. Pas sûr que cela suffise à clore le débat.
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L’aspartame est partout. Pour rappel, l’aspartame est un additif alimentaire qui permet de sucrer les boissons et les aliments sans recourir au saccharose traditionnel. L’industrie agroalimentaire y a donc très souvent recours dans les desserts, les chewing-gums et les médicaments, mais pas seulement. On le retrouve de plus en plus dans les sodas "allégés" et la majeure partie des produits "minceur", dont il permet d’améliorer le bilan nutritionnel. Vous avez un doute sur sa présence dans un aliment ? Vérifiez la présence d’E951 sur l’emballage car il n’est pas toujours indiqué noir sur blanc dans la liste des ingrédients.
Pour l’autorité sanitaire, l’aspartame n’est pas toxique. Pour clore les débats sur sa dangerosité, l’agence européenne a compilé 600 études scientifiques sur le sujet. Bilan, "l'aspartame et ses produits de dégradation sont sûrs pour la consommation humaine aux niveaux actuels d'exposition", affirme l'EFSA. L’agence "exclut le risque potentiel que l'aspartame provoque des dommages aux gènes ou induise le cancer". Ses "experts ont "également conclu que l'aspartame n'entraînait pas de dommages pour le cerveau et le système nerveux et qu'il n'affectait pas le comportement ou le fonctionnement cognitif chez les enfants et adultes".
L’aspartame ne serait donc pas dangereux pour la santé si on n’excède pas une certaine dose journalière acceptable (DJA). Ce seuil est actuellement fixé à 40 mg par kg de poids corporel par jour et l'EFSA estime qu’il "n'y a pas lieu de revoir cette DJA". Ce qui signifie qu'un enfant 20 kg peut boire sans risque jusqu'a quatre canettes de soda light par jour. Pour un adulte ce sera entre 10 et 16 cannettes, selon le poids.
Mais son avis reste contesté... A en croire l’EFSA, il n’y a donc rien à changer dans les réglementations actuelles. Sauf que le gendarme de l’alimentation européenne inspire une confiance toute relative, et pour cause : son impartialité a plusieurs fois été remise en cause par des scientifiques et des eurodéputés, sans parler des associations qui militent pour plus de transparence, comme l'Observatoire de l'Europe industrielle.
Même la très sérieuse Cour des comptes européenne a consacré en 2012 un rapport à ces conflits d’intérêt très fréquents. Et ses conclusions sont au vitriol : une partie de ses dirigeants ont travaillé, avant ou après leur passage à l’EFSA, pour les lobbies de l’industrie agroalimentaire. Et ce sans indiquer ces liens alors que la loi les y oblige. Un conflit d’intérêts qu’on retrouve également chez les experts sélectionnés par l’agence. Sans parler de sa présidente de 2008 à 2012, Diana Banati, qui a quitté l’agence pour rejoindre l’ILSI, le lobby qui défend les intérêts… de l’industrie agroalimentaire et des fabricants d’OGM.
Une impartialité douteuse que n’a pas manqué de rappeler l'eurodéputée et ex-ministre française de l'Environnement Corinne Lepage, mardi sur Twitter :
l'@EFSA_EU n'a pas su édulcorer son avis l'#aspartame on va attendre le retour des chercheurs danois et italiens http://t.co/86siAyiQxk FD— Corinne Lepage (@corinnelepage) 10 Décembre 2013
S’il n’est pas toxique, l’aspartame est-il utile ? Quand bien même on ne douterait pas des avis de l’EFSA, ce dernier ne fait que souligner que l’aspartame n’est pas toxique. Mais est-il recommandé d’en manger pour diminuer sa consommation de sucre traditionnel ? Les nutritionnistes sont partagés : l'aspartame permet aux personnes en surpoids et aux diabétiques de combler leur envie de sucre dans le cadre d'un régime très strict. Mais chez les personnes en bonne santé, la consommation d'aspartame pose question car il entretient le goût pour le sucré : une étude de l'Inserm indiquait récemment que le risque de diabète était plus élevé chez les consommateurs réguliers de boissons "light" par rapport aux autres.
Ce dont on est sûr à propos de l'aspartame. Si le débat est loin d'être clos sur l'aspartame, les scientifiques ont néanmoins plusieurs certitudes. L'aspartame est recommandé pour un catégorie particulière de patients, les diabétiques, qui sont interdits de sucre. A l'inverse, l'aspartame constitue un risque reconnu pour les personnes souffrant de phénylcétonurie, une maladie héréditaire du métabolisme, peu courante et diagnostiquée dès la naissance en Europe.