Le gouvernement ménage les automobilistes. L'expérimentation d'une limitation de la vitesse sur les routes secondaires à 80 km/h au lieu de 90 km/h ne sera fera que sur d'infimes portions de routes en 2015.
Une expérimentation limitée. En évoquant en janvier un changement de la vitesse autorisée sur les routes nationales, départementales et communales, Manuel Valls, alors ministre de l'Intérieur, avait relancé l'éternel débat sur la vitesse au volant. Mi-juin, son successeur Bernard Cazeneuve avait tenté de calmer le jeu en annonçant que seule une expérimentation était envisagée. Le gouvernement a décidé de céder aux pressions des automobilistes réticents face aux demandes insistantes des associations de prévention.
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Une question de compréhension. "J'ai préféré une expérimentation parce que je pensais que cette mesure ne serait pas comprise et que n'étant pas comprise, elle ne donnerait pas les résultats attendus. Il faut un temps de pédagogie, de sensibilisation, d'expérimentation si on veut des résultats dans la durée", a répété le ministre vendredi. Celle-ci entrera en vigueur en février ou mars pour deux ans et uniquement sur trois tronçons, "des petites routes de campagne et peut-être une plus importante", a-t-on appris d'une source proche du dossier.
Une "nanomesure". "Ce n'est qu'une nanomesure", s'indigne la présidente de la Ligue contre la violence routière Chantal Perrichon, qui milite pour une baisse générale de la vitesse sur ces axes. "Ce sont les routes les plus meurtrières, c'est là que meurent 57% des gens sur les routes. Près de 400 vies pourraient être sauvées chaque année si le gouvernement avait le courage de proposer cette mesure", estime-t-elle en soulignant "l'urgence de la situation" alors que 2014 devrait s'achever sur la première hausse annuelle de la mortalité routière depuis douze ans.
La vitesse, toujours un levier ? Selon un modèle élaboré dans les années 1980 par le chercheur suédois Göran Nilsson, une baisse de la vitesse de 1% permet une diminution de 2% des accidents corporels et de 4% des accidents mortels. "Avec l'évolution des véhicules et des infrastructures, ce modèle est totalement dépassé", considère Pierre Chasseray, de l'association 40 millions d'automobilistes, opposé à tout changement. "Selon ce modèle, plus on roule vite, plus on a de chances de mourir. Or, c'est sur les axes où l'on roule le plus vite (les autoroutes, ndlr.) qu'il y a le moins de morts. Et le Danemark expérimente depuis deux ans une hausse de 80 à 90 km/h sur ses axes secondaires et ils n'ont pas plus de morts."