L'affaire pourrait faire jurisprudence. Accusée d'homicide involontaire, Danièle Canarelli, une psychiatre de 58 ans, a été condamnée mardi à un an de prison avec sursis. Le tribunal correctionnel de Marseille l'a jugé en partie responsable du meurtre commis par l'un de ses patients en 2004.
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Les faits. La spécialiste avait en effet laissé sortir de l'hôpital Edouard-Toulouse l'homme souffrant de schizophrénie. Joël Gaillard avait ensuite tué un octogénaire à coups de hachette à Gap, dans les Hautes-Alpes. Atteint d'une psychose schizophrénique à forme "paranoïde", Joël Gaillard avait de son côté, été jugé pénalement irresponsable de ce meurtre.
La psy responsable selon le tribunal. Après le non-lieu prononcé à l'encontre du patient de 43 ans, Michel Trabuc, un des fils de la victime, avait engagé une action contre l'Etat et contre l'hôpital, condamné en 2009 pour défaut de surveillance. Il avait également porté plainte contre tous ceux qui avaient pu faire preuve de négligence.
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Le tribunal correctionnel de Marseille a estimé mardi que la psychiatre avait elle aussi une responsabilité dans l'affaire. Le 13 novembre, lors d'un procès inédit très suivi par la profession, le procureur avait d'ailleurs requis cette peine contre Danièle Canarelli, 58 ans, médecin à l'hôpital marseillais Edouard-Toulouse.
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Le fils de la victime satisfait. Interrogé par Europe 1, Michel Trebus, le fils de la victime estime que cette décision de justice rend honneur à la mémoire de son père. "C'était pour la mémoire de mon père que j'ai fait tout ça. Un non lieu ça voulait dire que rien ne s'était passé. On attaque bien des infirmières, des médecins, pourquoi pas déposer plainte pour homicide involontaire contre une psychiatre", explique-t-il. Ce dernier reconnaît toutefois que la décision de justice ne changera pas tout. "Bon, le risque zéro n'existera jamais, mais j'espère que cela fera avancée la psychiatrie, que cela se reproduira le moins possible".
"La logique du bouc-émissaire". Dans le milieu de la psychiatrie, la condamnation de Danièle Canarelli suscite l'indignation. "Nous sommes abasourdis, la question de la psychiatrie c'est bien plus complexe que poser un diagnostic et donner une indication de tel traitement et c'est terminé. Nous demander, à nous psychiatre, de prédire que quelqu'un va faire un passage à l'acte c'est impossible. On ne travaille pas avec une boule de cristal", insiste Docteur Torres, psychiatre interrogée par Europe 1.
La spécialiste estime que les psychiatres sont pointés du doigt injustement et craint pour l'avenir de la profession. "Ça s'appelle la logique du bouc-émissaire. On ne fait plus de médecine, c'est ce qui est en train de se passer aux Etats-Unis, j'espère que l'on ne va pas en arriver là", commente-t-elle.
Les éléments de l'enquête qui l'accusent. Dans son ordonnance de renvoi, la juge d'instruction avait confirmé "des fautes multiples et caractérisées" de la psychiatre. Des négligences ayant "contribué au passage à l'acte violent de Joël Gaillard". Avant le drame de Gap, ce dernier avait commis plusieurs agressions, dont une tentative d'assassinat.
Il était notamment reproché à la psychiatre de s'être obstinée "dans ses certificats successifs, à noter l'absence de toute pathologie mentale", "en dépit des conclusions" concordantes de ses confrères. Ce qui l'a finalement "conduite à ne pas soumettre son malade à un traitement approprié" et à lui accorder fin 2003 une sortie à l'essai de longue durée.
La psy nie tout défaut de surveillance. A l'audience, la psychiatre avait reconnu avoir été confrontée à un "problème de diagnostic", mais nié toute négligence dans le suivi de Joël Gaillard, de son hospitalisation en 2000 à sa fugue en 2004. Soit vingt jours avant qu'il tue à Gap, à coups de hachette, le compagnon octogénaire de sa grand-mère, Germain Trabuc.