La très controversée réforme pénale de Christiane Taubira arrive enfin à l'Assemblée nationale, où elle sera discutée à partir de mardi. Initialement intitulé "projet de loi sur la prévention de la récidive et l'individualisation des peines", il a été rebaptisé par la commission des lois "projet de loi tendant à renforcer l'efficacité des sanctions pénales". En cause : les nombreux amendements importants introduits dans le nouveau texte.Europe1.fr vous présente les principales mesures de cette réforme pénale, combattue par la droite, mais aussi jusque dans les rangs de la gauche.
Des peines individualisées. Christiane Taubira propose de rétablir le principe de l'individualisation des peines, en supprimant les automatismes. Ainsi, les peines plancher, c'est-à-dire les peines incompressibles imposées par la loi, devraient être abandonnées. Tout comme les révocations automatiques de sursis ou de sursis avec mise à l'épreuve.
Les conditions d'aménagement des courtes peines seraient aussi revues. Depuis deux lois de 2004 et 2009, le seuil d'examen obligatoire "ab initio" (c'est-à-dire avant l'incarcération de la personne condamnée) pour pouvoir aménager une peine est d'avoir été condamné à au moins de deux ans - un an en cas de récidive. La réforme présentée par Christiane Taubira unifierait ce seuil à des peines d'un an pour tout le monde. Ce système ne concerne que les peines qui ne sont pas mises immédiatement à exécution, c'est-à-dire quand le condamné n'est pas incarcéré à l'issue de l'audience.
La création d'une "contrainte pénale". Cette nouvelle peine, exécutoire en milieu ouvert, entre dans le dispositif voulu par Christiane Taubira pour lutter contre la surpopulation carcérale. Après une période d'évaluation de trois mois, le juge d'application des peines (JAP) définira les obligations, interdictions, mesures de réparation et/ou de suivi auxquelles le condamné devra se soumettre. Une évaluation périodique (au moins une par an) permettra d'adapter les mesures. Le JAP pourra moduler dans un sens plus ou moins sévère, voire mettre fin à la contrainte pénale (au bout d'un an au moins et avec accord du parquet) ou révoquer la mesure. Un autre juge sera alors saisi pour décider d'une incarcération pour une durée maximale égale à la moitié de la peine de contrainte pénale initialement prononcée. Le condamné est averti de cette possibilité dès le prononcé de la peine.
La contrainte pénale pourra être prononcée pour une durée de six mois à cinq ans. Le projet initial réservait cette contrainte pénale aux délits passibles d'un maximum de cinq ans de prison, c'est-à-dire 80% des condamnations pour délits. La contrainte pénale ne remplace aucune peine, toutes les autres restants en vigueur. Elle ne s'appliquera néanmoins pas aux mineurs. Selon l'étude d'impact, 8.000 à 20.000 contraintes pénales devraient être prononcées chaque année.
La fin des sorties de prison sans accompagnement. Christiane Taubira veut mettre fin aux "sorties sèches", qui représentent actuellement 80% des sorties et même 98% pour les peines de moins de six mois. La réforme prévoit que la situation du détenu soit évaluée aux deux-tiers de la peine. Selon le parcours et le projet d'insertion du prisonnier, une "sortie sous contrainte" pourra être décidée par le JAP, comportant des mesures de restriction, d'obligation et/ou de surveillance. Entre 14.400 et 28.800 personnes pourraient bénéficier d'une libération sous contrainte par an.
Une possible césure du procès pénal. Le projet de loi accorde au tribunal la possibilité de prononcer la culpabilité et des mesures d'indemnisation des victimes lors d'une première audience. Et de renvoyer sa décision sur la peine à une seconde audience, après une période d'évaluation du prévenu de quatre mois maximum.
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