Si vous êtes parisien, il va falloir vous habituer à être filmés puisque de nouvelles caméras de vidéosurveillance, ou vidéoprotection selon le point de vue, vont être mises en place mercredi par la Préfecture de police. Le Premier ministre François Fillon va lui-même inaugurer ce nouveau dispositif d’un coût estimé à 90 millions d'euros. L’objectif est de mieux protéger les Parisiens, mais l'idée ne fait pas l'unanimité.
200 nouvelles caméras à Paris
Le renforcement de la vidéosurveillance se traduit par l’installation de 200 nouvelles caméras, mais aussi par la multiplication des centres de visionnages. Tous les commissariats des arrondissements de Paris vont être équipés d’écrans de contrôle alors qu’il n’existait jusqu’à présent que deux centres de visionnage dans la capitale.
L’objectif est clair : lutter plus efficacement contre l'insécurité grâce à l'effet dissuasif des caméras mais aussi en gardant une trace des agressions avec les images. "Un policier va pouvoir guider les patrouilleurs présents sur le terrain et leur permettre d’être plus réactifs", argumente Xavier Castaing, chef de la communication à la préfecture de police de Paris.
Les policiers ne risquent-ils pas d’être donc moins nombreux dans la rue ? "Au contraire, ils seront beaucoup mieux utilisés et on pourra les envoyer exactement là où se passe l’évènement", assure-t-il.
Moins de policiers dans la rue ?
Mais, conséquence indirecte : les effectifs policiers risquent néanmoins d’être amputés des agents chargés de surveiller les écrans de contrôle. Or certains pensent que rien ne remplace un policier qui patrouille dans la rue, à l’image de Jacques Boutault, le maire écologiste du deuxième arrondissement de Paris. "Je trouve que c’est dommage qu’on ne mette pas les gens là où ils sont le plus efficaces. Une caméra, avec son entretien annuel, coûte 22.000 euros, c’est-à-dire grosso modo la moitié du salaire d’un policier de terrain, donc quand on installe deux caméras, on enlève un policier de voie publique", argumente-t-il.
Le débat est loin d’être clos. A Nice, l'une des premières villes a avoir opté massivement pour la vidéosurveillance, le système s'est tellement affiné que vous pouvez même recevoir un PV parce qu'une caméra a détecté que vous vous êtes garé en double file. "Sur les deux années qui viennent de s’écouler, on constate un recul significatif de la délinquance : -11% cette année sur les cambriolages, -7% sur les atteintes aux personnes d’origine crapuleuse", déclare Benoît Kandel, l'adjoint à la sécurité de la ville de Nice.
"C’est le fruit du travail qu’on a pu mener en matière de sécurité", poursuit-il, avant de préciser : "cela n’est pas que de la vidéoprotection, c’est aussi une augmentation de nos effectifs, à savoir 100 policiers supplémentaires en trois ans".
Le dispositif coûte très cher
Si la ville de Nice estime que le système fonctionne, pour un coût de sept millions d'euros pour les 300 caméras, d’autres municipalités sont beaucoup plus sceptiques. Y compris l’agglomération de Londres, de l'autre côté de la Manche, où on dénombre une caméra pour 14 habitants.
La vidéosurveillance a donc coûté une fortune pour un résultat mitigé, comme le reconnaît le chef de la police : seulement 3% des vols à l'arraché ont été résolus grâce aux caméras. En revanche, il y a une donnée qui ne peut pas être quantifiée : l'effet dissuasif des caméras.
En 2009, l'Inspection générale de l'administration s’est penché sur la question et a estimé que la vidéosurveillance est très bénéfique. Sauf que les sociologues de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme d'Ile-de-France ont montré que cette étude était très discutable : l'administration a gonflé les résultats en incluant dans ses statistiques des délits sur lesquels la vidéosurveillance n’a aucun effet, comme par exemple les violences familiales ou les infractions au Code du travail.