Un "monument législatif" créant de "fortes ruptures". Le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, croit toujours en la magie du Grenelle. Mais en face de lui, associations, écologistes et députés de la majorité comme de l’opposition ne sont plus enthousiastes. Le projet de loi Grenelle 2 sur l'environnement arrive mardi sur le pupitre des députés, dans un climat de défiance alimenté par quelques reculs spectaculaires du gouvernement et la mobilisation des lobbies anti-éoliens. Revue des points qui fâchent.
La taxe carbone
Disposition phare de la révolution que devait opérer le Grenelle, la taxe carbone a été enterrée fin mars par le gouvernement, une décision "incompréhensible" pour Nicolas Hulot marquant "une vraie rupture dans l’ambition française en matière de protection de l’environnement". La Fondation Nicolas Hulot (FNH), acteur central du processus depuis le premier jour, décide alors de claquer la porte du Grenelle.
Les éoliennes
L’énergie éolienne est le symbole du recul opéré entre les grandes déclarations du Grenelle 1 et aujourd’hui. Les amendements adoptés en commission sur l'encadrement d’implantation d'éoliennes pourraient brider le développement de la filière et compromettre la réalisation de l'objectif ambitieux, inscrit dans la loi, de 23% d'énergie renouvelable en 2020. Présentée comme un moyen d'éviter le "mitage" du territoire, cette mesure serait, selon les professionnels du secteur, synonyme d'abandon pur et simple de dizaines de projets.
Les propos de Sarkozy
Les déclarations de Nicolas Sarkozy au Salon de l'agriculture, début mars, ont marqué les esprits. "L'environnement, ça commence à bien faire", avait dit le président aux agriculteurs. Un message à l’opposé de celui qu’il avait adressé en conclusion des tables rondes du Grenelle de l’environnement en octobre 2007. Il rêvait à l’époque d’un "New Deal écologique". Confronté au mécontentement des agriculteurs, il a annoncé, fin avril dans une interview à La France agricole, que l'utilisation de camions de 44 tonnes pour le transport de marchandises agricoles et agroalimentaires sera autorisée ''l'été prochain''. Un point gagné auprès des agriculteurs, mais un recul en matière de politique énergétique durable.
La méthode
Tous ceux qui ont participé au Grenelle saluent une méthode qui a marqué et restera : celle d'une véritable concertation. Gouvernement, patronat, syndicats, collectivités territoriales et ONG ont travaillé ensemble lors de tables rondes thématiques. "Novateur en matière de gouvernance, le processus du Grenelle a finalement accouché d'une souris", estime Greenpeace. Pour le député Verts Yves Cochet, l'impulsion initiale a perdu de sa vigueur: "La droite, sans doute sous la pression des lobbies, a beaucoup cédé par rapport aux engagements d'il y a deux ans et demi".
Le PS et les Verts mitigés
Les députés Verts dénoncent un "texte a minima" présenté dans un contexte de "détricotage du droit de l'environnement". A droite, nombre d’élus ne veulent plus en entendre parler. Et à gauche, le scepticisme domine. Les députés socialistes s'apprêtent à voter contre. Le leader d'Europe Ecologie Daniel Cohn-Bendit s'est démarqué mardi de ceux qui "refusent en bloc" le projet de Grenelle II de l'environnement, les invitant à être "plus lucides" et à juger le texte "mesure par mesure".