Le 17 octobre 1961, une manifestation organisée par le FLN et interdite à Paris tournait au massacre. 50 ans plus tard, l’organisation de commémoration sur les lieux du drame suscite toujours un vif débat, bien que de nombreux hommes politiques et intellectuels aient appelé l'Etat à reconnaître officiellement la responsabilité de la France.
1961 : le FLN organise une manifestation en plein Paris
Le 17 octobre 1961, à l'appel du mouvement indépendantiste algérien, entre 20.000 et 30.000 Algériens marchent dans Paris pour protester contre le couvre-feu imposé aux travailleurs algériens par le préfet de Paris, Maurice Papon. La guerre d’Algérie est alors à son paroxysme, accentuant les antagonismes.
Nombreux sont ceux qui viennent des bidonvilles de la banlieue parisienne. S'ensuit une répression policière d'une grande violence qui aurait fait, selon les estimations, entre 50 et 200 morts. La police est accusée par de nombreux témoins d’avoir tiré à balles réelles et jeté des hommes dans la Seine. D’autres manifestants auraient été torturés.
Un évènement difficile à reconnaitre
A l’époque, le bilan officiel faisait état de trois morts et aucune enquête judiciaire n'avait été menée. Ce n'est qu'en 1997 qu'un premier rapport officiel du conseiller d'Etat Dieudonné Mandelkern a conclu à un bilan de 32 morts, tout en resituant ces violences dans le contexte de la guerre d'Algérie.
En 1999, lors d'un procès en diffamation, le parquet de Paris a parlé de "massacre" et une autre enquête officielle menée par le magistrat Jean Geronimi dans les archives judiciaires a réévalué à "au moins 48" le nombre de tués.
Pour faire la lumière sur cet événement, politiques et associatifs demandent l'ouverture de toutes les archives d'Etat relatives à cette nuit. Mais ils attendent surtout une reconnaissance officielle de la France. Mais, même aujourd’hui, la guerre d’Algérie reste un sujet sensible.
Neuilly refuse d’accueillir toute cérémonie
Les évènements s’étant déroulés sur le pont de Neuilly, six communes des Hauts-de-Seine, des Yvelines et du Val d'Oise ont demandé au maire de Neuilly, Jean-Christophe Fromentin, de pouvoir y organiser une cérémonie d’hommage.
La ville de Neuilly a répondu par la négative. "Ma règle c'est de s'en tenir aux commémorations officielles et de célébrer des événements qui sont plutôt des événements qui rapprochent que des événements qui divisent", s’est justifié le maire.
Commémorer pour mieux tourner la page
D’autres considèrent au contraire qu’une commémoration en bonne et due forme permettrait d'ouvrir la page d'une "nouvelle fraternité franco-algérienne". "Le temps est venu de reconnaître (...) que ce soir-là, l'Etat Français a eu un comportement inacceptable", a déclaré le maire de Nanterre Patrick Jarry.
David Assouline, sénateur socialiste de Paris, a signalé lundi son intention de présenter au Sénat une demande de reconnaissance de cet événement. L'ex Premier ministre Michel Rocard et Stéphane Hessel, co-auteur de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ont également signé une pétition en ce sens.
En 2001, la répression du 17 octobre 1961 a été commémorée officiellement pour la première fois par le maire socialiste de Paris. Bertrand Delanoë avait dévoilé une plaque commémorative sur le pont Saint-Michel, en face de la préfecture de police, une cérémonie critiquée par l'opposition de droite et plusieurs syndicats de policiers.