Malgré les précautions, des contrôles renforcés et des déclarations de bonne intention, le Tour de France 2012 n’aura donc pas été épargné par les affaires de dopage présumé. C’est cette fois-ci un Français, Rémy Di Grégorio, qui est dans l’œil du cyclone. Le coureur provençal, ainsi que deux autres individus, ont été interpellés mardi et placés dans la foulée en garde à vue à Marseille. Retour sur une affaire qui en rappelle d’autres.
Qui est Rémy di Grégorio ? Agé de 26 ans et considéré comme un espoir du cyclisme français, Rémy Di Grégorio est un coureur de l’équipe Cofidis, qu’il a rejointe en 2012. Il a fait ses débuts professionnels au sein de l’équipe FDJ puis a couru en 2011 pour l’équipe Astana. A son palmarès figure une victoire d’étape lors du Tour des Asturies 2012 et une seconde lors de l’édition 2012 de Paris-Nice. Le jour de son arrestation, il pointait à la 35e place du Tour, à 18 minutes du leader Bradley Wiggins.
Pourquoi a-t-il été arrêté ? Les gendarmes de la section de recherche de Marseille et de la cellule antidopage, l’OCLAESP, enquêtent depuis juin 2011 sur l’équipe Astana, soupçonnée d’avoir massivement recouru au dopage. Dans le viseur des enquêteurs, mais au second plan, Rémy Di Grégorio est devenu une cible prioritaire lundi soir. Placé sur écoute téléphonique, les enquêteurs l’ont alors entendu appeler un homme soupçonné de vendre des produits dopants et qui se trouvait à quelques kilomètres de l’hôtel de l’équipe Cofidis. Détail supplémentaire, cet homme a été interpellé avec, dans son véhicule, des produits assez douteux pour intéresser les enquêteurs.
De quoi est-il accusé ? Mais si Rémy Di Grégorio a été mis en examen, jeudi, ce n'est pas en raison de produits, mais bien de pratiques dopantes. Le motif retenu contre lui est en effet la "détention d'un procédé interdit sans justification médicale", à savoir "un kit d'injection de glucose". Tout type de transfusion est désormais interdit par l'Agence mondiale antidopage (AMA).
Est-ce ses premiers démêlés avec la justice ? Oui et non. Si Rémy Di Grégorio n’a jamais été interpellé ni mis en examen auparavant, les gendarmes l’avaient déjà entendu en 2011 dans le cadre de l’enquête sur l’équipe Astana. Les enquêteurs l’avaient alors même sermonné pour l’achat de substances douteuses mais légales, rapporte L’Equipe dans son édition du 11 juillet.
Qui sont les deux autres hommes interpellés ? L’interlocuteur téléphonique du coureur a été arrêté mardi à Bourg-en-Bresse, ainsi qu’un autre individu, cette fois-ci à Marseille. Ces deux hommes se présentent comme "naturopathes", c’est-à-dire pratiquant une médecine non conventionnelle à base de régime alimentaire, d’hygiène de vie et de plantes naturelles. Si l’un d’eux a été libéré mercredi matin, aucun produit illicite n'ayant été trouvé dans son véhicule, le second a été entendu par la juge Annaïck Le Goff, jeudi. Cet homme, âgé de 75 ans, a admis devant les gendarmes chargés de l'enquête avoir pratiqué des injections d'ozone, ainsi que des prélèvements de sang aux fins de l'enrichir avec de l'ozone et de le réinjecter au coureur. Par ailleurs, une somme de 26.000 euros en liquide a été saisie à son domicile.
Quelles conséquences sportives et judiciaires pour le coureur ? Rémy Di Grégorio a été immédiatement suspendu à titre conservatoire par son équipe et forcé d’abandonner l’édition 2012 du Tour de France. S’il est reconnu coupable, il sera tout simplement exclu de son équipe.
Quelles conséquences pour l’équipe Cofidis ? Le préjudice est avant tout médiatique, puisque l’équipe française voit son nom associé à une nouvelle affaire de dopage. Mais les faits qui sont reprochés au coureur remonteraient surtout à l’année 2011, lorsqu’il faisait partie de l’équipe Astana. De plus, aucun véhicule de l'équipe Cofidis n'a été fouillé, ce qui laisse penser que l'affaire Di Gregorio est bien une affaire individuelle. Concrètement, Cofidis a surtout perdu un coureur, certes classé 35e, mais tout de même deuxième parmi les neuf coureurs Cofidis encore en lice pour ce Tour 2012.
Comment ont réagi les organisateurs du Tour ? "Cela veut dire très clairement que les instances du monde du sport, UCI (Union cycliste internationale) et AFLD (Agence française de lutte contre le dopage), et les autorités de santé publique, ne baissent pas les bras, ne relâchent pas leurs efforts", a commenté Christian Prudhomme, directeur du Tour. "Ceux qui trichent se font prendre tôt ou tard, chacun doit bien le comprendre et ça nous va très bien."
D’autres coureurs ont-ils déjà été arrêtés en plein Tour ? Il s’agit de la première arrestation pour soupçon de dopage sur l’édition 2012. Le Tour 2011 avait en revanche été marqué par l’exclusion du coureur russe Alexandr Kolobnev, de l'équipe Katusha, après un contrôle antidopage positif. En 2010, c’est tout simplement le vainqueur Alberto Contador qui s’était vu retirer son titre après un contrôle positif, mais après la compétition. En 2007, le Kazakh Alexandre Vinokourov, contrôlé positif, quittait le Tour avec toute son équipe, Astana, mais sans être lui aussi interpellé. Pour en savoir plus, le très détaillé site Cyclisme-Dopage recense toutes les affaires depuis… 1960.
Est-ce la première affaire chez Cofidis ? Certainement pas, cette équipe a déjà défrayé la chronique en 2004 et en 2007. La première fois, plusieurs coureurs avaient été inquiétés, provoquant un changement radical à la tête de la direction sportive. En 2007, le coureur italien Cristian Moreni avait été contrôlé positif à la testostérone le 19 juillet, puis interpellé à Pau et exclu de la compétition.
Et au fait, comment se déroulent les contrôles pendant le Tour ? Deux types de contrôles existent : les premiers se déroulent en dehors des périodes de compétition sportive et de manière inopinée, souvent au domicile du coureur testé. Le second type de contrôle a lieu juste après les étapes du Tour, un médecin attendant le coureur ciblé dès qu’il a franchi la ligne d’arrivée. Les contrôleurs prélèvent avec du matériel scellé de l’urine, parfois des ongles et des cheveux et plus rarement du sang. Ces échantillons sont ensuite repartis en deux lots, le second étant conservé en cas de contestation des résultats par le coureur.
>> A quoi se dope un sportif ? Les réponses, c'est ici.