Le tracé pas net du TGV des Landes

La maison familiale de François-Gilles Egretier, menacée par le premier tracé. © MAXPPP
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Thomas Morel avec AFP , modifié à

Un conseiller de Christine Lagarde aurait fait changer un tracé pour épargner sa maison.

Un conseiller de Lagarde au ministère des Finances a-t-il fait détourner la ligne à Grande vitesse qui doit relier Bordeaux à l'Espagne pour épargner sa maison ? C'est en tout cas ce que soupçonne une association d'habitants d'Uchacq-et-Parentis, petit village des Landes.

L'affaire commence en 2010, lorsque Réseau Ferré de France (RFF), qui gère le réseau ferroviaire, dévoile le tracé de la nouvelle ligne Bordeaux-Bilbao. Une ligne qui passe, entre autres, sur une soixantaine d'habitations de la commune d'Uchacq-et-Parentis. Pour les membres de l'association "les voix du fuseau Nord", qui défendent le tracé prévu à l'origine, c'est là que Francis-Gilles Egretier, ex-conseiller de Christine Lagarde du temps où elle était ministre de l'Economie, entre en jeu.

Car parmi les demeures menacées de démolition se trouve celle de sa famille. Selon l'association, le conseiller aurait alors usé de son influence dans les ministères pour faire déplacer le parcours de la ligne à grande vitesse. Avec succès : en mai 2010, RFF publie un nouveau tracé qui passe 3.000 mètres plus au nord. Cette fois, seules 40 habitations sont concernées, et celle de Francis-Gilles Egretier est épargnée.

Plainte pour trafic d'influence

Furieux, certains habitants du village créent "les voix du fuseau nord", et portent plainte une première fois au parquet de Mont-de-Marsan. Mais la plainte est finalement classée sans suite en 2012. Leur avocat saisit alors le doyen des juges d'instruction d'une plainte avec constitution de partie civile, cette fois au nom des riverains eux-mêmes.
Cette fois, l'affaire est confiée au juge van Ruymbeke, déjà en charge du volet financier de l'affaire Karachi et de l'affaire Kerviel, et qui, le 17 décembre dernier, a auditionné des responsables de l'association.

Pour étayer leur dossier, les membres de l'association s'appuient sur un certain nombre d'e-mails en leur possession, qu'ils estiment révélateurs et que Libération a pu consulter (payant). Ainsi, ce courrier adressé le 4 février 2010 au maire de la commune : "Je vais entrer plus directement en contact avec un de mes confrères au cabinet Bussereau pour piloter plus finement l'avancée de notre dossier".

"Ils se cherchent un bouc émissaire"

A Uchacq-et-Parentis, toutefois, tout le monde n'est pas dans le camp des "voix du fuseau nord". A commencer par le maire, Jean-Claude Lalagüe, qui estime que le trajet final "était dans l'intérêt de la commune, impactait beaucoup moins de propriétés au total, et faisait économiser des millions à RFF". Selon lui, les plaignants ne sont guère plus qu' " une bande d' 'incorruptibles' touchés par le tracé et qui se cherchent un bouc émissaire".

De leur côté, les plaignants se disent "déterminer à aller au bout" pour pourfendre ce qu'ils considèrent comme un trafic d'influence