Gauche, droite, même avis. L'adhésion des Français de tous bords aux nouvelles mesures sécuritaires de Nicolas Sarkozy, mêmes les plus polémiques, dévoile un hiatus entre les partis de gauche et leur électorat qui pose un défi aux états-majors, à deux ans de la présidentielle.
Un sondage Ifop pour Le Figaro a montré, jeudi, un ample soutien de l'opinion au-delà de l'âge, de la profession, mais aussi des préférences politiques au discours de Grenoble du chef de l'Etat. Ainsi, 62% de sondés marqués à gauche sont favorables au retrait de la nationalité pour polygamie ou excision. De même ils sont 60% (66% proches du PS, 55% à l'extrême gauche) à approuver le démantèlement de camps illégaux de Roms.
Un virage sécuritaire
Cependant ces taux sont très inférieurs à ceux des sympathisants de droite (94% pour l'expulsion des camps de Roms et pour la déchéance en cas de polygamie ou excision). Par ailleurs, le clivage droite-gauche se reconstitue sur une vidéosurveillance renforcée (47% pour à gauche, 88% à droite) ou la prison proposée pour des parents de délinquants récidivistes (35% favorables à gauche 75% à droite).
Il n'en reste pas moins que l'électorat de gauche ne semble pas suivre les dirigeants dans leurs dénonciations virulentes des projets présidentiels, comme lorsque la numéro un socialiste Martine Aubry fustige une "dérive antirépublicaine". "Toutes les surenchères ou les critiques des socialistes sont à côté de la plaque", jubile Xavier Bertrand, patron de l'UMP. "Cela montre que le PS est complètement incompétent dans le domaine de l'insécurité, qu'il n'est plus en phase avec le pays".
Des sujets pour faire diversion
Mais pour François Bayrou, "ces chiffres ne sont absolument pas surprenants : on appuie là où la société française est le plus sensible, faute de pouvoir donner au peuple ce dont il a besoin, on lui sert un discours anti-immigration". "Ce n'est pas en attisant ce genre de passions qu'on conduit un pays à affronter ses problèmes", avertit le président du MoDem.
"Que les Français veuillent lutter contre tout ce qui est illégal, c'est le bon sens", analyse Christophe Borgel (PS). "Ce qui est en jeu, ce n'est pas cela ! C'est la désignation de boucs émissaires pour masquer l'échec de la politique sécuritaire sarkozyste." "Dans une situation de crise - on le voit dans d'autres pays européens - les discours les plus populistes, les plus xénophobes peuvent marquer des points s'il n'y a pas d'alternative forte", observe le porte-parole du PCF Olivier Dartigolles.
Pour le politologue Stéphane Rozès, "Nicolas Sarkozy sait pertinemment que les mesures les plus répressives rencontreront l'adhésion". "Il ne suffira donc pas en 2012 à la gauche de dénoncer les mesures sarkozystes. Il lui faut proposer un pacte républicain incluant une réponse globale et cohérente sur la sécurité", ajoute ce professeur à Sciences Po.