En grève. Ils ont enfilé leur robe noire et se sont rendus à leur palais de justice, mais dans la plupart des cas, ce n'était pas pour plaider. Des milliers d'avocats étaient en grève jeudi dans toute la France pour protester contre la réforme du financement de l'aide juridictionnelle. La Chancellerie prévoit en effet de taxer les avocats pour financer cette aide, qui permet aux justiciables les plus modestes de bénéficier d'une prise en charge des honoraires d'avocat et des frais de justice.
"Les mêmes droits que les nantis". A Nantes, Metz, ou Evry, la presque totalité des audiences a ainsi été renvoyée, à l'exception des sessions d'assises. Des rassemblements ont également réuni notamment 300 avocats à Bordeaux, 200 à Strasbourg, 180 à Nantes, 150 à Lyon et une centaine à Paris. En Seine-Saint-Denis, où 70% de la population est éligible à l'aide juridictionnelle, les avocats réclament le doublement des crédits qui y sont consacrés. En chanson, ils ont marché jeudi pour que "les plus démunis aient les mêmes droits que les nantis".
Et pendant que #nemmouche quitte Versailles, les avocats en colère débarquent... pic.twitter.com/bYQgPDYv5a— Pierre de Cossette (@Pdecossette) 26 Juin 2014
Le financement de l'AJ en question. Les avocats se mobilisent à l'heure où le gouvernement cherche à définir un mode de financement pérenne de l'aide juridictionnelle. La réforme du financement de l'AJ avait déjà été reportée au début de l'année suite notamment à la grogne des avocats. Mais le Conseil national des barreaux (CNB), qui représente les 60.000 avocats de France, dénonce le fait que la chancellerie n'a "retenu aucune des propositions de la profession et poursuit au contraire sa réflexion tendant à instaurer une taxe scandaleuse sur le chiffre d'affaires des cabinets d'avocats".
Proposition de créer un "fonds d'aide juridique". "C'est une volonté de nous mettre en porte-à-faux et de dire qu'on va défendre nos propres intérêts", dénonce, au sujet d'une telle taxe, Me Gabriel Benesty, lors du rassemblement sur les marches du palais de justice de Paris. "C'est de la manipulation pure et simple !" La profession, qui réclame aussi la revalorisation du montant de l'AJ, propose notamment de l'abonder par des "financements complémentaires" et la création d'un "fonds d'aide juridique", ainsi qu'un plus grand recours aux assurances.
Les #Avocats d'#Arras en grève pour la revalorisation de l'#AideJuridictionnelle ! #AJenpérilpic.twitter.com/8DcQzbx1RY— Antoine le GENTIL (@AntoineLeGENTIL) 26 Juin 2014
Un système "à bout de souffle". "Depuis plus de dix ans, des rapports attestent que le système d'aide juridictionnelle est à bout de souffle", a réagi la ministre de la Justice Christiane Taubira dans un communiqué, réaffirmant "sa volonté" de le réformer. Elle a promis de développer vendredi "les options étudiées par le gouvernement" devant l'assemblée générale de la Conférence des bâtonniers, l'instance représentant les barreaux de province.
"Je suis réaliste. Il y a peu de chances qu'elle nous annonce de très bonnes nouvelles", a dit Jean-Marie Burguburu, président du Conseil national des barreaux (CNB) qui avait appelé à une "grève totale".