La justice a décidé lundi de ne pas les poursuivre pour des dépenses en dehors des clous.
La justice s'est penchée lundi sur le sort de plusieurs collaborateurs du président de la République, accusés de ne pas avoir respecté les règles de transparence dans les dépenses de communication et de sondage de l’Elysée. La cour d'appel de Paris a finalement décidé de ne pas poursuivre pour "favoritisme" ces conseillers en raison de l'immunité dont bénéficie le locataire de l'Elysée.
Si le juge d'instruction voulait poursuivre son travail, le parquet, qui dépend du ministère de la Justice, estimait qu’une telle enquête est illégitime. L’enjeu de cette procédure était de taille : les collaborateurs de l’Elysée peuvent-ils invoquer l’immunité dont bénéficie le président de la République ? Pour la cour d'appel de Paris, la réponse est oui.
Des dépenses de communication hors procédure
La justice s’intéressait aux dépenses en communication de l’Elysée depuis que celles-ci ont vu leur volume exploser. Entre 2006 et 2010, elles sont passées de près de 95 millions d'euros annuels à 133,4 millions d'euros, soit 41 % d'augmentation, a constaté la Cour des comptes.
Les enquêteurs s’intéressent particulièrement à une convention signée le 1er juin 2007 au nom de la présidence par Emmanuelle Mignon avec la société Publifact études, dirigée par Patrick Buisson, proche de Nicolas Sarkozy.
Mais cette convention s’est révélée irrégulière car passée sans appel d'offres, alors même qu’elle porte sur un montant de 1,5 million d'euros annuels, plus 10.000 euros de rémunération mensuelle. L'association anti-corruption Anticor a donc saisi la justice et mène depuis un chemin de croix.
Interprétation extensive de l’immunité présidentielle
Le parquet ne fait en effet pas de cette affaire une priorité : il a une première fois classé l'affaire sans suite fin 2010, puis demandé la fin des poursuites, estimant que les collaborateurs du président de la République bénéficiaient de l'immunité pénale attachée à sa fonction car ils agissaient juridiquement en son nom.
Pour le juge Serge Tournaire, cette interprétation est abusive. "L'article 67 de la Constitution ne vise pas 'la présidence de la République', qui pourrait s'entendre du chef de l'Etat et de l'ensemble des services qui lui sont rattachés, mais la seule personne du président", écrivait le juge dans son ordonnance.
C’était donc à la cour d'appel de Paris d’arbitrer entre les juges et le parquet et elle a privilégié la théorie de l'immunité présidentielle élargie : à moins que les conseillers n'aient signé ces documents de leur propre et exclusive initiative, ils ne peuvent être poursuivis car il agissent pour le compte du président de la République et donc sous le cadre de son immunité.
Face à ce refus, l’association Anticor pourrait se saisir d’une autre affaire : la Cour des Comptes a également pointé un contrat en communication conclu avec la société Giacometti-Péron, dont l'un le fondateur, Pierre Giacometti, est proche du président et participait au dîner du Fouquet's le soir de son élection en 2007.