"Je vous le dis bien dans les yeux : je n’ai rien à me reprocher ! Vous m’entendez ? Rien !". Ces mots sont ceux de Nicolas Sarkozy, mis en examen dans la nuit notamment pour trafic d'influence, qui s'exprimait mercredi soir lors d'une interview exclusive sur Europe 1 et TF1. L'ex-président est ainsi revenu sur cette dernière affaire dans laquelle il est suspecté d'avoir tenté, par l'intermédiaire de son avocat Me Thierry Herzog, d'obtenir des informations sur une décision de la Cour de cassation dans le dossier Bettencourt. En échange, Gilbert Azibert, "la taupe" de Nicolas Sarkozy au sein de la haute juridiction, devait obtenir un poste à Monaco.
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"Où est le trafic d'influence ?" "Monsieur Azibert était candidat à un poste à Monaco. Il ne l’a pas eu", a assuré Nicolas Sarkozy mercredi soir. "Mon avocat, Thierry Herzog, m’a demandé si je pouvais me renseigner pour faire une démarche auprès de Monaco. Je n’ai pas fait cette démarche, c’est dans le dossier, c’est prouvé. Le palais de Monaco a indiqué qu’il n’y a eu aucune démarche en faveur de monsieur Azibert", avance-t-il. "Et par ailleurs, il existe une écoute – qui n’a pas fuité dans la presse, on se demande bien pourquoi – où je dis à Thierry Herzog : 'non, je ne ferai pas l’intervention'", a-t-il avancé.
"Enfin, la décision de la cour de Cassation, que j’attendais positive, fût négative. Résumons le dossier sur le fond : monsieur Azibert n’a rien obtenu, je n’ai pas fait de démarche et j’ai été débouté par la Cour de cassation", a rappelé l'ex-président. "Où est le trafic d’influence ? Où est la corruption ? Qui a corrompu, et pour quel objet ? C’est scandaleux, et d’ailleurs ces motifs ont été retenus dans le seul souci de la continuation d’humilier, de m’impressionner, de m’empêcher, de me diffamer", a-t-il dénoncé.
Paradoxalement, avec ces propos, Nicolas Sarkozy valide une partie des soupçons. Il confirme que Gilbert Azibert a sollicité, via l'avocat Thierry Herzog, son intervention pour un poste à Monaco. Et même s'il prétend qu'il n'a pas donné suite. En droit, il suffit d'une promesse, même non tenue, pour parler de trafic d'influence.
Des chefs de mise en examen "grotesques". Mis en examen pour "recel de violation du secret professionnel", "corruption active", et "trafic d'influence actif", Nicolas Sarkozy juge "ces chefs d'accusation grotesques". "Et je vais vous en donner la preuve", a-t-il ainsi asséné.
"Lorsque je suis arrivé après quatorze heures d’interrogatoire par les policiers, je ne connaissais pas le dossier", a assuré l'ancien pensionnaire de l'Elysée. "J’ai accepté de répondre à tous les questions, scrupuleusement. Cela a donné 45 pages au procès verbal qui était à la disposition des juges. Elles m’ont signifié, sans même me poser une question, trois motifs de mise en examen, avant même d’avoir répondu à quoi que ce soit", a-t-il poursuivi.
En réalité, la procédure est tout à fait normale. Cela fait quatre mois que les deux juges d'instruction enquêtent sur le dossier. Elles savaient donc ce qu'elles allaient reprocher à l'ancien président de la République. Par ailleurs, elles ont suivi les gardes à vue en temps réel. Elles connaissaient donc parfaitement le contenu du procès verbal. Et le contenu de l'audition ne fait d'ailleurs pas 45 pages. Selon nos informations, les réponses de Nicolas Sarkozy tiennent en effet sur huit pages, pour le reste, il s'agit de la procédure.
EXTRAIT - Nicolas Sarkozy : "Je n’ai rien à me...par Europe1frKadhafi et les écoutes. Nicolas Sarkozy est ensuite revenu sur les conditions de sa mise sur écoute dans ce dossier de trafic d'influence, en lien d'abord avec l'affaire du financement libyen de sa campagne 2007. "Qu’espérait-on recevoir de ces écoutes ? Que Monsieur Kadhafi, d’où il est, me téléphona ?", a-t-il lâché. "Vous pensez-bien que si on avait trouvé un compte ou un virement de Monsieur Kadhafi, vous en auriez été informé avant moi", a-t-il poursuivi, avant de dénoncer que le contenu de ces écoutes ait servi dans le cadre d'un autre dossier. Est-il normal, alors qu’il n’y a aucun indice grave et concordant contre moi, qu’on poursuive les écoutes, sur l’ancien chef de l’Etat, qui pourra demain avoir des responsabilités d’opposition ?", a-t-il demandé.
En ce qui concerne le bien fondé des écoutes, les magistrats justifient la mise sur écoute. Contrairement à ce que dit l'ancien chef de l'Etat sur l’absence "d'indice grave et concordant", ce sont d'autres écoutes, pratiquées sur des proches de Nicolas Sarkozy, qui ont amené les juges à le placer sous surveillance.
Un parallèle avec l'affaire Cahuzac. Interrogé sur le fait qu'il ne voudrait pas être considéré comme un "justiciable normal", Nicolas Sarkozy a assuré qu'il "ne demande aucun droit particulier". "Je ne veux aucun avantage", a-t-il insisté avant de rappelé avoir déjà eu affaire à la justice dans les dossiers Bettencourt et Karachi.
Pour autant, il estime que sa garde à vue est "anormale", faisant ensuite un parallèle avec l'affaire Cahuzac. Il y a eu une volonté de m’humilier, en me convoquant sur le statut de la garde à vue, qui n’est pas un statut normal. Monsieur Cahuzac, le ministre du Budget de monsieur Hollande, qui était en charge de la lutte contre la fraude fiscale et à qui on a découvert un compte en Suisse, n’a pas fait une seconde de garde à vue", a-t-il souligné.
Les deux affaires sont totalement différentes. Si Jérôme Cahuzac n'a pas été placé en garde à vue, c'est parce qu'il a lui-même demandé à être reçu par le juge, pour tout avouer, avant de le faire publiquement.
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