Au procès de l'Ecole en bateau, le principal accusé réfute s'être livré à des actes pédophiles.
L'INFO. Leonide Kameneff, 76 ans, fondateur de l'Ecole en bateau, est accusé d'avoir violé, pendant près de 30 ans, plusieurs des enfants qui avaient embarqué à bord du Karrek Ven. Poussé dans ses retranchements dès les premières heures du procès mardi devant la cour d'assises des mineurs de Paris, l'ancien psychothérapeute de 76 ans a livré un récit qui risque de peser lourd dans la suite des débats.
>> A LIRE AUSSI - TEMOIGNAGE E1 : "Kameneff était Dieu le Père"
"La frontière n'était pas très nette". "J'étais peut-être de l'autre côté de la ligne sans m'en rendre compte", a déclaré Leonide Kameneff. "Que j'ai eu des gestes répréhensibles, certainement, mais ce n'est pas de l'attirance pédophilique", a-t-il poursuivi. Variante quelques instants plus tard : "vous avez raison de dire qu'on était à la frontière et que la frontière n'était pas très nette".
Parti du récit de sa vie et des raisons qui l'ont amené à prendre le large avec des enfants de 9 à 16 ans, les questions serrées du président ont progressivement abordé la nudité sur les bateaux-école, les massages collectifs, la sexualité à bord, et celle la sienne. "Si l'on vous demande si vous éprouvez une attirance physique pour les enfants?" lui suggère le président. "Je crois que je serais menteur si je donnais une réponse franche à cette question. Entre parents et enfants, il peut y avoir une attirance, c'est une limite difficile à fixer", répond le septuagénaire d'une voix douce. "Si on a des sentiments de tendresse et d'affection réciproque pour d'autres, ça peut aller un peu plus loin (...), pour moi c'était de l'affection."
"C'est du jeu, c'est de l'affection". Pour l'accusé, la caractérisation de pédophilie est impropre car "le pédophile se fiche de l'enfant, l'enfant n'a aucune importance pour lui". "Alors si ce n'est pas de l'attirance pédophilique", c'est quoi ?", rétorque le président. "C'est du jeu, c'est de l'affection", affirme leonide Kameneff.
Ces termes "affection", "jeu", "sensualité" reviennent constamment dans le discours de ce défenseur d'une éducation libre et responsable des enfants, qui ne cesse de jouer sur les mots. En dépit du risque de s'incriminer lourdement par ces déclarations, n'hésitant pas à répondre "cela dépend ce qu'on entend par relation sexuelle", l'accusé ne semble pas y voir d'aveu des faits qui lui sont reprochés.
"On se tripote un peu et on rigole". Les plaignants ont décrit au fil de l'instruction une idéologie des adultes encourageant les pratiques sexuelles entre enfants à bord des bateaux, sans violence mais avec une forte emprise psychologique de Leonide Kameneff. "C'était comme ça, c'est tout", considéraient les adolescents à l'époque, selon certaines déclarations. Une spontanéité qu'a essayé de défendre Kameneff face à la cour : lors de massages, "des caresses peuvent provoquer une érection, on se tripote un peu et on rigole". "Cela ne s'est pas passé 500 fois, c'était exceptionnel", tente-t-il de nuancer, en avouant aussi se sentir "responsable si des jeunes souffrent aujourd'hui".
Au terme d'un laborieux échange, Léonide Kameneff a fini par avouer "une relation d'intimité physique" avec un de ses coaccusés, Bernard Poggi-Vérigon, âgé de 59 ans. Il avait alors "une douzaine d'années". Devenu majeur, il sera ensuite son compagnon de bord.