"Certains exemples sont carrément caricaturaux. Dans la 'chirurgie matérielle' par exemple, vous avez une sorte de gourou charlatan, qui prétend remplacer des vertèbres sans opération chirurgicale." Une commission d’enquête sur les mouvements sectaires dans le domaine de la santé du Sénat a réalisé 72 auditions d'associations de victimes, de professionnels de santé, d'experts et de représentants d'autorités sanitaires. Et elle a remis son rapport mercredi. Elle dresse ainsi une liste de 41 propositions pour lutter contre ces "dérives thérapeutiques". Que retenir du rapport ? On vous résume tout.
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Le constat. "Il existe des dérives thérapeutiques dues à des pratiques commerciales, proches de la charlatanerie, qui exploitent les peurs et les attentes de la population en matière de santé et de bien-être, et qui peuvent insidieusement orienter leurs victimes vers des pratiques thérapeutiques souvent dénuées de fondement scientifique", écrit la Commission dans son rapport.
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"Malade, ma sœur les a crus"par Europe1frLes raisons. L'image que donne notre "système de santé" est l'une des explications majeures de ces dérives. La Commission juge ainsi "très alarmant" le fait que l'image de la médecine classique soit altérée par l'inquiétude et le climat anxiogène "de scandales récents". Mediator, prothèses PIP, craintes autour de la pilule de troisième génération... Pour Jacques Mézard, sénateur du Cantal et rapporteur de la commission d'enquête, invité jeudi matin sur Europe 1, ces scandales ont "des dégâts considérables" : "nous avons une médecine de grande qualité, des progrès considérables ont été effectués. Ces affaires ont dégradé l'image de la médecine en ouvrant, avec en plus Internet, un champ d'action terrible pour des charlatans qui proposent tout et n'importe quoi."
Qui sont les "charlatans" ? "Ils ne s'appellent plus psychothérapeute, mais coach, coach en nutrition, en bien-être… Ils proposent des médecines dites alternatives, ils se constituent en instituts, se parent de diplômes non reconnus par l'Etat", décrypte pour Europe 1 Annie Guibert, présidente du Centre contre les manipulations mentales. Et de poursuivre : "vous avez par exemple 'l'Université du temps'. La dame qui a fondé ça se dit 'sophro-magnétiseur'. Moi, rien que ça, ça éveille ma curiosité et je recule. Mais tout le monde ne recule pas. Il y a le mot 'université'."
Quelles sont leurs pratiques ? La Commission et les associations ont des dizaines d'exemples de victimes trompées. "Rien que la semaine dernière, on a vu une dame, déjà d'un certain âge, qui se trouvait trop ridée. On lui a proposé quelque chose sans lifting. Elle a été reçue, dans un 'institut', et en 15 minutes on lui a demandé 20.000 euros. Heureusement, elle n'avait pas son carnet de chèques. Car elle était prête à le faire, tellement elle était embobinée", raconte Annie Guibert. Du citron pour soigner le cancer, de la psychothérapie pour déprogrammer sa maladie, des guérisseurs par téléphone ou encore des sprays purificateurs, des pierres thérapeutiques et des appareils à champs magnétiques vendus entre 1.000 et 5.000 euros… les exemples de traitement inutiles, proposés sur Internet ou par les "charlatans", sont légion, comme le relate ce rapport. Jacques Mézard s'alarme : "le phénomène est grave, car cela pousse nos concitoyens à s'éloigner des traitements efficaces".
Comment lutter ? "Il ne s'agit pas de faire de nouvelles lois", assure Jacques Mézard. "Appliquons l'arsenal législatif et réglementaire existant. Il faut prendre des décisions, par exemple, pour que les messages des pouvoirs publics, des autorités de santé, figurent sur les moteurs de recherche en première page. Qu'il y ait des avertissements comme pour la pédopornographie, que les gendarmes aient de meilleurs moyens pour surveiller".
Le rapport appelle aussi les procureurs de la République à porter une attention particulière aux plaintes déposées par des proches des victimes de dérives ou encore d'intégrer la prise en compte du bien-être du patient aux protocoles de soins, selon des modalités précises, afin de lutter contre le sentiment de "déshumanisation des soins". "Il y a des solutions simples, pas coûteuses", souligne Jacques Mézard, qui insiste : "il est temps d'agir."