Le scandale du Mediator est finalement remonté jusqu’aux plus hautes sphères des laboratoires Servier, créateurs du médicament accusé d’avoir causé la mort de centaines, voire de milliers de personnes en France. Les plus hautes sphères, c’est en l’occurrence Jacques Servier, président-fondateur, qui a été mis en examen mercredi soir. Il a été remis en liberté mais placé sous contrôle judiciaire en échange d'une caution de quatre millions d'euros.
Jacques Servier est notamment poursuivi pour "homicides et blessures involontaires, tromperie aggravée et escroquerie". L’entrepreneur était entendu depuis mercredi matin par la justice, et ce pour la première fois depuis l’éclatement du scandale sanitaire à la mi-2010. Au terme de son audition, la justice a obligé Jacques Servier à fournir par ailleurs une "garantie" de six millions d'euros avant le 15 décembre.
Cinq personnes morales poursuivies
Cinq personnes morales, qui correspondent à cinq sociétés du groupe Servier, ont aussi été mises en examen mercredi soir. Il est reproché aux laboratoires Servier d’avoir masqué la vraie nature du médicament, et minimisé la portée d’effets secondaires, qui ont pourtant entraîné des valvulopathies, des affections cardiaques fatales.
L'avocat de Jacques Servier a assuré mercredi soir que "ces mises en examen ne préjugent en rien de la culpabilité des Laboratoires Servier et de Jacques Servier". Et Me Témime d'indiquer qu'"ils vont maintenant pouvoir s'expliquer et se défendre".
"Il ne s’agit que de trois morts"
Jacques Servier, 89 ans, ne s’est jamais exprimé en public sur l’affaire. En mars, la 9e fortune de France - 3,8 milliards d’euros en 2009 -, avait été entendu devant la mission d’information ad hoc à l’Assemblée nationale. Il n’avait montré guère d’empathie envers les victimes potentielles, avaient alors regretté les participants.
Car l’homme, décoré Grand-Croix de la Légion d’’honneur par Nicolas Sarkozy le 31 décembre 2008, douterait en privé de l’existence même d’un scandale sanitaire. "500 est un très beau chiffre marketing, mais il ne s'agit que de trois morts", aurait lancé Jacques Servier lors de ses vœux 2011 à ses employés, avait révélé Libération. Xavier Bertrand, ministre de la Santé, s’était dit "stupéfait" de telles déclarations.