Le chiffre. 95% des dossiers déposés par les victimes présumées du Mediator ont été écartés par le groupe d’experts chargé de reconnaître les personnes réellement victimes de ce médicament pour ensuite leur accorder un dédommagement financier. Cette cellule spéciale de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux n’a ainsi retenu que 68 des 1.493 dossiers qu’il a étudiés à ce jour. Au total, 7.721 dossiers avaient été déposés. Les associations de victimes commencent à hausser le ton et s’interrogent sur une telle proportion de refus.
• L’incompréhension des victimes. Comment expliquer en effet autant de refus ? Dominique Courtois, président de l’Association d’aide aux victimes du Mediator (Avim), ne le comprend toujours pas et pointe des incohérences. "Chez certains patients, on se retrouve avec des situations totalement contradictoires : les experts judiciaires qui ont examiné les victimes reconnaissent la responsabilité du Mediator. Mais pas le collège d’experts, qui se prononce uniquement à partir du dossier médical", a-t-il détaillé.
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• Servier pointe des dossiers infondés. Pour le laboratoire qui a produit ce médicament, il n'y a rien d'anormal au contraire à voir tant de dossiers retoqués. "Il n’y a effectivement pas beaucoup de patients indemnisés, en partie parce qu’il y avait beaucoup de dossiers déposés qui n’avaient rien à voir avec le Mediator", s’est félicité mardi sur Europe 1 le laboratoire Servier par la voix de sa porte-parole, Lucie Vincent. Et cette dernière de poursuivre : "fort heureusement, la vaste majorité des patients ont une incapacité (de travail, ndlr) très faible. Dans le processus qui a lieu habituellement, on ne regarderait même pas le dossier de ces patients et cela explique pourquoi les sommes impliquées ne sont pas très très fortes".
• De l'argent contre l'abandon des poursuites ? Mais, outre la bataille médicale en cours sur l’impact du Mediator chez chaque victime présumée, les associations accusent le laboratoire de court-circuiter la procédure en cours en proposant de l’argent contre l’abandon des poursuites. "Nous avons des propositions d’indemnisation faites par le laboratoire Servier qui varient entre 5.000 et 40.000 euros mais qui sont largement insuffisantes par rapport à ce qu’elles devraient être", dénonce Dominique Courtois. "Les laboratoires Servier jouent sur du velours puisque ce sont des personnes d’un certain âge, des personnes qui, c’est ce qu’ils me disent, n’ont jamais eu 10.000 euros sur le compte en banque pour certains. Donc manifestement, ils ont envie d’accepter cette quasi-obole qui leur est proposée", ajoute le président de l’Avim.
• Mediator, où en est-on ? Commercialisé entre 1976 et 2009, le Mediator était normalement destiné aux diabétiques en surpoids. Mais il a largement été prescrit comme coupe-faim et est soupçonné d'avoir provoqué 500 à 2.000 décès, selon plusieurs études. Outre le volet indemnisation des victimes, le fondateur des laboratoires Servier, Jacques Servier, a été mis en examen en décembre pour homicides et blessures involontaires
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