L'argent, c'est désormais le nerf de la guerre dans le scandale du Mediator. A l’issue d'une ultime rencontre entre les représentants du laboratoire Servier et l'émissaire du gouvernement, le ministère de la Santé a décidé mercredi de mettre en place un fonds d'indemnisation à destination de toutes les victimes de ce médicament. Le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, en a fait l'annonce lui-même aux représentants des malades concernés lors d’un entretien téléphonique.
Toutes les victimes concernées...
Ce fonds sera mis en place avant l’été et concernera "toutes les victimes du Mediator, sans distinctions", a fait savoir Dominique Courtois, qui préside l’Association d’aide aux victimes du Mediator et de l’Isoméride (AVIM), à l’origine de la demande de création d’un fonds. C'est l’ONIAM, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, qui devrait gérer les dossiers.
Le Mediator aurait fait en 33 ans entre 500 et 2.000 morts, avant d'être retiré du marché français en novembre 2009. Plusieurs centaines de plaintes ont été déposées dans ce dossier.
... mais Servier, "premier responsable", devra payer
"A travers ce dispositif, l'objectif est bien une indemnisation légitime des victimes du Mediator", a expliqué le ministère de la Santé dans un communiqué diffusé mercredi soir. Mais "il ne s'agit pas de payer à la place de Servier", a rappelé jeudi matin Xavier Bertrand, déplorant que le laboratoire ait "en tête la protection de ses intérêts financiers".
"C’est pourquoi avant toute indemnisation par l’ONIAM, une demande d’indemnisation sera formulée aux Laboratoires Servier. Si ceux-ci refusent, l’ONIAM pourra, après avoir indemnisé les victimes, saisir la justice pour se faire rembourser ces sommes. Dans ce cas, le responsable pourra se voir appliquer une pénalité pour ne pas avoir accepté la demande initiale", développe le communiqué.
L'offre de Servier était trop faible
Le mois dernier, les laboratoires Servier avaient proposé un fonds d'indemnisation de 20 millions d'euros concernant les victimes souffrant d'une incapacité partielle permanente inférieure à 25%, qui sont exclues des procédures légales prévues par la loi Kouchner de 2002 et des remboursements par la Commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI).
Les associations avaient alors estimé qu'il fallait aussi prévoir un fonds d'indemnisation pour les victimes les plus gravement atteintes, puisque les CRCI étaient "incapables de gérer autant de dossiers à la fois" et n'avaient pas les experts nécessaires. Elles avaient souhaité un "guichet unique".
Elles avaient aussi jugé "inacceptable" que les victimes indemnisées doivent renoncer aux poursuites civiles, comme l'avait proposé Servier, et que le laboratoire puisse gérer le fonds d'indemnisation. Les dernières offres de Servier ont été rejetées fin mars par le ministre, qui a exigé une "réparation intégrale du préjudice".
Servier se dit déçu
Le laboratoire Servier s'est dit jeudi "déçu" par le mode d'indemnisation des victimes de son traitement Mediator présenté mercredi par le ministre de la Santé. Selon le groupe pharmaceutique, de possibles "malentendus" ou "fantasmes" peuvent avoir conduit au rejet de sa proposition.