Il y a des "incohérences factuelles majeures". C'est en ces termes que le parquet de Paris a pointé mercredi un décalage entre les accusations formulées par le père de Mohamed Merah dans sa plainte pour meurtre et les éléments déjà connus de la procédure judiciaire.
Le parquet souligne qu'elles concernent notamment les transcriptions supposées de vidéos prises par Mohamed Merah, ajoutant qu'aucun téléphone susceptible d'avoir permis d'enregistrer de telles images n'a été retrouvé sur le tueur au scooter et dans son appartement, selon un communiqué.
Un talkie-walkie
"Aucun iPhone, aucun téléphone d'aucune sorte, n'a été découvert lors de la perquisition menée dans l'appartement, pas plus que sur Mohamed Merah", écrit le procureur de la République. Le parquet a d'ailleurs rappelé que les négociations entre le Raid et Mohamed Merah s'étaient faites via un talkie-walkie.
Son père, Mohamed Benalel Merah, résidant en Algérie, a déposé plainte lundi pour "meurtre" contre la hiérarchie de la police française ayant donné l'ordre de lancer l'assaut qui a tué son fils le 22 mars. Ses avocates ont joint dans cette plainte une retranscription partielle de vidéos du jeune homme qu'elles affirment détenir, sans pour autant transmettre ces vidéos.
Pas de "Zouheir"
Les enregistrements réalisés de leur côté par la police judiciaire, qui sont en cours de restranscription, n'ont "jamais fait état d'un dénommé 'Zouheir'", selon le parquet.
Selon les transcriptions de vidéos supposées publiées par un quotidien algérien Echorouk, Mohamed Merah affirme avoir été trahi par un ami dénommé "Zouheir" qu'il accuse de travailler pour les services de renseignements français.
Pour faire la lumière sur ces liens supposés, le parquet assure avoir déjà "sollicité la communication immédiate des enregistrements vidéo allégués au soutien de cette plainte" mais n'a toujours rien reçu. L'avocate algérienne du père de Mohamed Merah, Me Zahia Mokhtari, a déclaré de son côté à qu'elle était prête à se rendre en France pour remettre des vidéos-testament à la justice française, une fois reçue la demande officielle du parquet de Paris.
"Des doutes"
Cette rare mise au point du parquet intervient alors que les enquêteurs ont également fait part de leurs "doutes" et de leurs "plus grandes réserves" sur l'existence de ces enregistrements vidéo, selon des sources policières.
"Merah n'avait ni téléphone portable, ni ordinateur, ni appareil photo" pendant le siège de son domicile par le Raid, ont précisé ces sources. "Si Merah avait été en possession d'appareils enregistreurs, ils auraient dû être saisis après sa mort lors des constatations sur place", selon ces sources, ce qui n'a pas été le cas. "D'où viennent ces prétendues vidéos, par quelles voies ont-elles été obtenues et qui lui aurait fourni un téléphone portable pour se filmer ? C'est matériellement très difficile à expliquer", ont aussi précisé ces sources policières.
Un haut responsable de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), sous couvert d'anonymat, affirmait mardi à Europe 1, que ces enregistrements vidéo étaient "bidon complet". Mohamed Merah n'avait, selon lui, jamais été "traité" ni par la DCRI, ni par la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Il s'étonnait, d'ailleurs, que ces vidéos, si elles existent, ne soient pas sorties "avant" dans la presse.