Les rapports de la DCRI sur Mohamed Merah suscitent le malaise. Ces documents, déclassifiés vendredi dernier par le ministère de l’Intérieur et transmis à la justice, soulignent que le tueur de Toulouse était surveillé et connu des services de renseignements depuis 2009.
Selon ces rapports rédigés entre 2007 et 2011, Mohamed Merah constituait une "cible privilégiée" de la DCRI. Les 23 pages du document détaillent en effet la proximité du tueur en scooter avec les islamistes radicaux toulousains. Des informations qui écartent donc la thèse du "loup solitaire" soutenue par l’ancien patron de la DCRI, Bernard Squarcini, au moment des faits. Europe1.fr revient sur les informations contenues dans ces documents de la DCRI.
Le frère de Mohamed Merah, principale cible de la DCRI. C'est dans un premier temps le profil d'Abdelkader Merah qui interpelle les enquêteurs. Ce dernier est décrit comme un proche du "groupe de Toulouse", des salafistes arrêtés en 2007 et condamnés en 2009 pour avoir développé une filière de candidats au jihad, rapporte Le Parisien.
Abdelkader Merah, installé en Egypte en novembre 2009 pour y suivre un enseignement religieux axé sur le jihad, entretenait "des contacts téléphoniques réguliers avec son frère", précise le rapport. De son côté, Mohamed Merah, sorti de prison en août 2009 pour une série de délits, figure dans la note de "suivi de la mouvance salafiste radicale toulousaine".
La formation de Merah suivie par la DCRI. En novembre 2010, une nouvelle note décrit le tueur à scooter comme "un membre d’une fratrie d’islamo-délinquants". L'islamisation de Mohamed Merah se précise. Les enquêteurs soulignent en effet que le suspect prend des cours de religion à domicile et de langue arabe.
Une formation qui coïncide avec "l'arrivée d'une nouvelle génération d'islamistes toulousains en 2010", indique le rapport. Un groupe de jeunes recrues avec "aux convictions intactes et une détermination renforcée", selon les notes de la DCRI.
La radicalisation de Mohamed Merah sous-estimée. Si les voyages du tueur à scooter en Afghanistan sont connus des services de la DCRI, ce dernier ne semble pas pour autant faire l'objet de mesures spéciales. Après avoir été entendu par la police locale à Kandahar, en Afghanistan, à la fin de l'année 2010, les renseignements intérieurs français décrivent "un individu au lourd passé délinquant en phase de radicalisation".
Le rapport de la DCRI indique seulement que ce voyage dans une ville considérée comme un bastion de jihadistes "doit nous interpeller". Ils conviennent toutefois "d’approfondir l’environnement" amical et familial de Mohamed Merah, ajoute la note.
Un nouveau voyage de Merah anticipé par la DCRI. Dans un nouveau rapport daté de septembre 2011, le profil d’islamiste radical de Mohamed Merah ne fait plus de doute. Les enquêteurs de la DCRI anticipent même "un nouveau départ en octobre de Merah vers le Pakistan". Le tueur en scooter effectuera effectivement un séjour au Pakistan sans être inquiété par les membres de la DCRI.
Ce n'est qu'à son retour, en novembre 2011, qu'il est entendu par l’antenne locale de la DCRI à Toulouse. Mohamed Merah reconnaît s'être rendu au Pakistan mais évoque des motifs touristiques. Mais pour la DCRI, ses déplacements constituent une "menace directe car les jeunes djihadistes peuvent revenir avec pour instruction de conduire des actions armées". La suite, tragique, est connue de tous. Entre le 11 et le 22 mars 2012, Mohamed Merah organise trois tueries au cours desquels sept personnes seront tuées, trois militaires, trois élèves et un père de famille le 19 mars dans une école juive.