Faut-il interdire aux mères qui portent le voile d'accompagner les sorties scolaires ? Le ministre de l'Education, Luc Chatel, y est favorable. Il s'appuie sur la loi de 2004 qui interdit les signes religieux à l'école. Mais le Premier ministre, François Fillon, se montre beaucoup plus réticent.
Une question simple qui est pourtant loin d'être tranchée : la loi sur la laïcité s'applique-t-elle aux élèves seuls, ou également à leurs parents pendant les sorties scolaires ? Dans une école primaire de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, près d’une mère sur trois, venant chercher son enfant au déjeuner, porte le voile.
"Il n'y a jamais eu de souci"
Parmi elles, Zohra, très investie dans l'école. Elle ne comprend pas le sens de la démarche de Luc Chatel : "quelqu’un qui ramènerait ses enfants en sortie scolaire, qui porterait le string, ça ne le dérange pas, ça ne choque pas. Mais quelqu’un qui est pudique, qui applique sa religion, ça les dérange. Je ne vois pas pourquoi", s'agace-t-elle .
"Il n’y a jamais eu de problème. On a toujours accompagnés, depuis des millénaires, nos enfants avec le voile. Il n’y a jamais eu de souci", souligne Zohra.
Selon elle, "c’est un faux problème" :
Sur cette question, il n’existe pas vraiment de règle. Les élèves n'ont pas le droit de porter le voile mais concernant les collaborateurs occasionnels du service public, c'est-à-dire les parents accompagnateurs, les lois sont floues. C'est donc du cas par cas.
A Montreuil ou Pantin, des directrices interdisent les sorties aux femmes voilées. A Bobigny, au contraire, Véronique Decker fait très souvent appel à des mères voilées. "Si les mamans voilées se voyaient interdites d’accès à l’accompagnement des sorties scolaires, nous serions obligés d’annuler un certain nombre d’ateliers faits par des assistants. (…) Donc évidemment ce serait au détriment d’un bon fonctionnement de l’école".
Dans ce débat, il y a plusieurs intervenants, dont les syndicats de professeurs. Le secrétaire général de l'Unsa, Patrick Gonthier, plaide pour une loi qui clarifierait les choses. Une loi qui interdirait aussi bien le voile, que la kippa ou la croix autour du cou.
"Ne pas rester dans l'improvisation"
"La loi permettrait d’éviter les tensions’", estime le leader syndical au micro d’Europe 1. "Ça éviterait que chacun fasse son choix sans référence réelle. Aujourd’hui, on ne peut pas rester dans l’improvisation totale", fait-il valoir.
Et même au sein des fédérations de parents d'élèves, le sujet fait débat. La PEEP, la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public, préférerait que les parents intervenant à l'école restent neutres. La FCPE, la Fédération des conseils des parents d'élèves, en revanche, défend vivement les mères voilées interdites de sorties scolaires.
Mais le gouvernement ne veut pas trancher à chaud ce sujet sensible. Un groupe de travail interministériel a donc été mis en place et fera des propositions après l'été.