La polémique ne cesse d'enfler. Le meurtrier présumé d'Agnès, 13 ans, est un lycéen de 17 ans qui était scolarisé dans le même établissement, le collège-lycée Cévenol. Le jeune homme, qui a reconnu les faits, avait été accusé de viol en 2010. Après quatre mois passés en prison, il avait été accueilli au collège-lycée Cévenol, qui dit aujourd'hui ne pas avoir eu connaissance du motif de son incarcération. Une enquête a été ouverte pour déterminer s'il y a eu ou non "défaillance" dans le suivi de l'accusé. Retour sur les éléments de la polémique.
Quelles sont les circonstances de la mort d'Agnès ? Le corps calciné de l'adolescente a été retrouvé vendredi soir. La jeune fille a été tuée "de façon extrêmement violente et brutale", selon le procureur, qui a souligné que l'acte était prémédité et que l'assassin présumé s'était muni d'"objets". Le lycéen accusé a reconnu avoir attiré la jeune fille dans la forêt au prétexte d'aller chercher des champignons hallucinogènes, avant de la violer, la tuer et la brûler. C'est lui qui a indiqué aux enquêteurs où retrouver le corps d'Agnès.
Quel est le profil de son meurtrier présumé ? Âgé de 17 ans, le meurtrier présumé avait déjà un lourd passé : issu d'une famille sans histoire, il est accusé d'avoir violé une jeune fille sous la menace d'une arme en 2010, dans le Gard. Libéré sous contrôle judiciaire après quatre mois de détention préventive et en attendant d'être jugé, il a ensuite intégré le collège Cévenol du Chambon-sur-Lignon.
Le jeune homme avait été "sevré" de son "problème de stupéfiant" depuis son passage en maison d'arrêt". Lors de son interrogatoire, il est resté "très froid et sans émotion" selon le procureur. Une ancienne camarade de classe l'a quant à elle décrit comme un garçon "parfois louche", avec des "manières bizarres".
Comment la justice l'avait évalué ? Le procureur de la République à Nîmes, qui a géré ce dossier après le viol de 2010, assure que les expertises le jeune homme jugeaient "pas dangereux" et "réinsérable". "Il y avait une série de renseignements favorables. Il avait un projet éducatif, des parents mobilisés et surtout il n'y avait pas de dangerosité qui apparaissait à la lecture des expertises et il était réinsérable", a expliqué le procureur Robert Gelli mardi. "Le parquet a accepté une remise en liberté adaptée à la situation, c'est-à-dire sous contrôle judiciaire avec la nécessité d'un suivi psychiatrique et psychologique", a ajouté Robert Gelli, soulignant que le lycéen n'avait enfreint aucune des règles de sa remise en liberté.
Que savait le collège ? La direction de l'établissement savait que le jeune homme avait fait un passage en prison. Mais elle a affirmé ignorer le motif de cette incarcération. "Je ne suis pas là pour replonger un élève dans son passé, je suis là pour essayer avec lui de trouver une solution d'avenir", a justifié sur Europe 1 le directeur du collège-lycée Cévenol.
Mais pour le père de la victime, Frédéric Marin, la direction du collège était "au courant" du passé du meurtrier présumé. Frédéric Marin a même affirmé que le jeune homme "avait eu des problèmes pour des faits d'agression sexuelle", au point qu'il a été envisagé de "le virer".
Et l'institution judiciaire ? Également pointé du doigt, le suivi judiciaire du lycéen fera l'objet d'une réunion lundi après-midi à Matignon autour de François Fillon. Le garde des Sceaux, Michel Mercier, a ordonné l'ouverture d'une enquête pour "savoir s'il y a eu défaillance ou non". "Il est vraisemblable que nous constaterons, et ce n'est pas vraiment une surprise, que la science psychiatrique n'est pas une science exacte", a souligné le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant.
Quelles vont être les conséquences politiques de cette affaire ? Laurent Wauquiez, ministre de l'Enseignement supérieur, dont la mère est maire du Chambon-sur-Lignon, s'est voulu pondéré, appelant sur Europe 1 à éviter toute polémique autour de l'assassinat d'Agnès. "Je ne voudrais pas qu'avec l'emballement politique et médiatique, chacun y aille de son petit commentaire à la va-vite", a-t-il ajouté, notant qu'il fallait "se poser les bonnes questions". Selon lui, les lois assurant la protection des mineurs délinquants ne sont plus adaptées car "un certain nombre de jeunes dans notre société sont beaucoup plus violents qu'à l'époque où on a adopté ces règles".
Pierre Moscovici, directeur de campagne de François Hollande, a réclamé sur Europe 1 des "centres fermés". L'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, a pour sa part estimé que l'affaire révélait "un dysfonctionnement majeur" de la justice", jugeant "pas normal" que le collège n'ait pas été informé des antécédents de l'accusé.
Les décisions ne se sont pas faites attendre. Pour prévenir ce type de drame, François Fillon a demandé à l'issue d'une réunion ministérielle que "pour les crimes les plus graves, le garde des Sceaux demandera aux parquets de requérir le placement en centre éducatif fermé jusqu’au jugement".