C’est un Manuel Noriega physiquement diminué, mais combattif, qui a comparu mardi devant un juge des libertés et de la détention. A 76 ans, l’ex-dictateur panaméen, cheveux de jais, chemise blanche et veste de toile noire n’a toutefois pas pu éviter l’incarcération à la prison parisienne de la Santé, où il attendra son procès pour blanchiment d'argent de la drogue, onze ans après sa condamnation par contumace.
Le juge a estimé que la détention constituait l'unique moyen de maintenir Manuel Noriega à disposition de la justice, demandant cependant à ce que ses conditions d'incarcération soient compatibles avec son statut de prisonnier de guerre. Le magistrat a ainsi accédé partiellement à la demande de la défense, qui a demandé que Manuel Noriega bénéficie de ce statut.
11,4 millions d’euros d’amende
Mais les avocats de l’ancien dictateur ont aussi plaidé l’incompétence de la justice française à le juger en raison notamment de son statut de chef d'Etat à l'époque des faits qui lui sont reprochés (1988-1989) et de la prescription de ces faits. "Comme prisonnier de guerre, j'ai droit à tout ce que la convention de Genève prévoit, comme le rapatriement à la fin de la captivité", a lui-même déclaré l’accusé, qui vient de purger 20 ans de prison aux Etats-Unis, avant d’être extradé mardi matin en France.
Manuel Noriega, homme fort du Panama de 1981 à 1989, a été condamné par défaut par le tribunal correctionnel de Paris le 1er juillet 1999 à 10 ans de prison et 11,4 millions d'euros d'amende pour blanchiment. La justice lui reproche d'avoir transféré en France 2,3 millions d'euros provenant du cartel de la drogue de Medellin, en Colombie. Manuel Noriega affirme que ces fonds proviennent de l'héritage de son frère, de la fortune de sa femme et de versements de la CIA.
Le Panama demande son extradition
Par ailleurs, le Panama a annoncé son intention de demander à la France l'extradition de son ancien dictateur. "Panama va faire la demande d'extradition comme le prévoient nos lois, mais tout dépend du gouvernement français", a déclaré l'actuel président Ricardo Martinelli. L'ancien dictateur de 76 ans a été condamné au Panama à 54 ans de prison pour son implication dans la disparition et le meurtre d'opposants entre 1968 et 1989, année où il a été chassé du pouvoir par une intervention militaire américaine.