Jean-Claude Mas, fondateur de la société PIP, s'est vigoureusement défendu vendredi devant le tribunal correctionnel de Marseille. Devant une centaine de plaignantes attentives, ce dernier a assuré n'avoir "pas fait prendre de risques" avec les implants mammaires frauduleux qu'il fabriquait. Avec quatre ex-cadres de PIP, Jean-Claude Mas est jugé jusqu'au 17 mai pour "tromperie aggravée" et "escroquerie" pour avoir, dans les années 2000, rempli les prothèses d'un gel de silicone industriel non autorisé.
"Pas homologué mais homologable". "Le gel PIP n'était pas homologué mais il était homologable", a-t-il affirmé dans un prétoire silencieux. "Au niveau cohésivité (stabilité), je suis certain, j'affirme qu'il était supérieur au Nusil (le gel conforme)", a-t-il répété, montrant parfois un léger agacement. Mas a redit qu'il s'estimait compétent pour proposer ce gel, en dépit d'un parcours professionnel divers, allant de vendeur d'assurances-vie à employé "dans les diamants" puis représentant en vins.
S'il avait pu obtenir un statut de formulateur (le statut de fabriquant industriel de gel), il l'aurait fait, a-t-il affirmé au procureur. "Malheureusement il fallait un million d'euros pour avoir une unité pour devenir formulateur, je manquais d'argent", a-t-il assuré. L'enquête a cependant montré que l'usage du gel non conforme au lieu du Nusil avait permis à la PME d'engranger un gain annuel d'un million d'euros. Selon les autorités sanitaires, un quart des prothèses retirées des porteuses depuis le début du scandale étaient défectueuses (perspiration du gel, rupture des enveloppes), générant notamment des réactions irritantes.
Des femmes "fragiles". Dans l'après-midi, l'agacement a franchi un cran, quand le procureur Jacques Dallest l'a interrogé sur ses déclarations en garde à vue, dans lesquelles il traitait les plaignantes de femmes "fragiles" en quête "de fric". Beaucoup de femmes dans la clientèle de la chirurgie esthétique "ne sont pas bien dans leur peau", "sont fragiles", a répondu Mas, provoquant un brouhaha dans la salle et s'attirant un "connard" venu des sièges des victimes.
Le soulagement des plaignantes. Parmi la centaine de plaignantes encore présentes vendredi, s'exprimait le soulagement de voir le procès aborder le fond du dossier, après deux jours de procédure. Isabelle Traeger se disait "apaisée". "Il (Mas) ne se cache de rien!", relevait cette infirmière de 56 ans lors d'une suspension d'audience, convaincue qu'il sera condamné, "même s'il n'admet pas encore que c'est du poison".
Plus de 5.250 femmes, françaises pour l'essentiel, ont porté plainte dans cette affaire (pour environ 30.000 porteuses de ces prothèses en France, et plus encore à l'étranger), et l'Agence du médicament, la Ligue contre le cancer sont parties civiles, ainsi que TUV, le groupe allemand chargé de certifier les prothèses.