Dans une semaine jour pour jour, le 31 mai prochain, c'est la journée mondiale sans tabac. D'ici là, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, devrait lancer son plan anti-tabac. Une série de mesures doit ainsi être annoncée pour limiter la consommation de cigarettes en France et empêcher notamment que les plus jeunes se mettent à fumer.
Mais tous les arbitrages ne sont pas faits et les lobbys sont puissants : industrie du tabac, buralistes, associations de lutte contre le tabagisme, tentent de peser de tout leur poids dans cette dernière ligne droite. Objectif : influer sur les dernières décisions de la ministre de la Santé, mais aussi de Bercy et de l'Élysée. Europe 1 a toutefois eu connaissances des pistes vers lesquelles se dirige le gouvernement.
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Pas d'augmentation significative du prix du tabac. Un temps évoquée, la hausse dissuasive du paquet de cigarette de l'ordre de 10 à 15 % ne devrait pas voir le jour. Pourtant, ce niveau entraîne mécaniquement une baisse de la consommation de tabac, selon toutes les expertises internationales. Mais le gouvernement s'y refuse pour ne pas se mettre l'opinion à dos et renforcer la colère des buralistes déjà dans la rue. Et surtout, pour ne pas perdre d'argent. Car, la vente du tabac remplit une partie des caisses de Bercy. De la bouche même des industries du tabac, si les ventes baissent de 5% - ce qui est déjà le cas depuis le début de l'année (5,6%) - les fabricants et l'État ne gagneraient plus d'argent. Et ce n'est pas le moment.
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Un paquet progressivement neutre. Mais ce "cadeau" aux fabricants à une contrepartie. Le gouvernement entend en effet agrandir les avertissements sanitaires, c'est-à-dire les mots et les images choc sur les paquets de cigarettes. Leur surface devrait atteindre jusqu'a 75% du paquet et devrait figurer sur les faces avant et arrière. Aujourd'hui, ces images n'occupent qu'un tiers de la face avant et comprennent un encadré avec un message sanitaire. La face arrière, elle, est couverte d'images de poumons malades sur seulement 40% de la surface. Il ne s'agit donc pas encore de "paquet neutre", où la marque est reléguée en tout petit caractère, comme en Australie. Mais on s'y rapproche. La ministre de la Santé s'y est d'ailleurs montrée favorable.
Une aide aux fumeurs. Autre contrepartie : une partie de l'argent gagnée par l'État devra être consacrée à la prise en charge des fumeurs pour qu'ils arrêtent. Les substituts nicotiniques - patchs, chewing-gums - pourraient être proposés gratuitement à certaines catégories de population. Mineurs et femmes enceintes seraient concernés, mais la liste des bénéficiaires n'est pas encore définitive. Tout va dépendre de l'enveloppe dont disposera la ministre de la Santé.
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Quid de la cigarette électronique ? La place des cigarettes électroniques sur le marché devrait par ailleurs être évoquée. Ces produits rencontrent en effet un grand succès et grignotent petit à petit le marché. On dénombre pour l'heure 500.000 usagers et ils devraient être un million d'ici la fin de l'année. Pour l'instant, cette cigarette qui contient quand même de la nicotine est considérée comme un objet de consommation courante, soumise à aucune règle sanitaire.
Marisol Touraine ne devrait pas l'interdire comme le font certains pays, mais édicter quelques règles. Par exemple, le gouvernement entend que ces cigarettes moins dangereuses pour la santé restent accessibles aux fumeurs pour les aider à diminuer, voire stopper leur consommation de tabac, mais qu'elles restent difficiles d'accès pour les mineurs qui s'en servent comme une initiation à la "clope". La volonté du gouvernement serait donc de l'interdire aux mineurs, comme les cigarettes classiques et aussi d'interdire leur usage dans les lieux ou la cigarette est déjà interdite : bureaux, lieux publics, avions, etc. L'endroit où elles seront vendues n'est pas encore très clair. Mais le gouvernement semble vouloir privilégier plutôt les boutiques spécialisées et les buralistes. Et pas seulement les pharmacies comme il en a été question à un moment. Enfin, Marisol Touraine réfléchit à les taxer aussi, pour rendre leurs prix dissuasifs pour les plus jeunes.