Le recensement actuel suscite des doutes sur sa fiabilité. Entre le décret de décembre 2011 et l'Insee, les statistiques françaises divergent de près d'un million de personnes, comme le révèle l'article du Monde qui pointe, mercredi, l'abandon du recensement général au profit du comptage par sondage.
Quelle est la méthode ?
La méthode a été modifiée. Depuis 2004, la France a choisi d'alléger ses méthodes de recensement, passant d'un recensement exhaustif tous les huit ou neuf ans à une méthode par sondage, ce qui permet à la fois d'alléger le coût de l'opération et de disposer de chiffres plus fréquents.
Chaque année, les habitants de 8% des logements de chaque commune de 10.000 habitants ou plus sont recensés, tandis que ceux des communes plus petites sont recensés exhaustivement une fois tous les cinq ans. Ainsi, entre 8 et 9 millions de personnes participent au recensement chaque année.
Quel chiffre est le plus fiable ?
Les deux chiffres sont en réalité exacts. Comme l'explique le quotidien du soir, le premier est une projection scientifique. Le second se fie aux comptages des agents recenseurs effectués entre 2007 et 2011. Les deux méthodes sont donc totalement scientifiques.
Concrètement, au 1er janvier 2012, la France compte 65,35 millions d'habitants, rappelle l'Insee qui estime sa marge d'erreur à environ 15.000 personnes (0,02%). Comme tous les ans, ce chiffre, qui est une estimation, a été publié par l'Insee vers le 20 janvier. Parallèlement, le Journal officiel publie vers le 30 décembre les chiffres définitifs (également calculés par l'Insee) de la population, arrêtés trois ans plus tôt. Un exemple : fin 2011, le JO a validé par décret le fait que la population au 1er janvier 2009 (ou au 31 décembre 2008) était de 64,3 millions d'habitants.
"La France gagnant entre 300.000 et 350.000 habitants chaque année", poursuit l'Insee, on se retrouve donc bien aux environs de 65,35 millions d'habitants trois ans plus tard au 1er janvier 2012.
Mais seul le chiffre publié au JO a valeur légale, et c'est sur lui que sont basés notamment les dotations financières aux collectivités ou le nombre de conseillers municipaux.
Quelles conséquences ?
Cette méthode de recensement provoque l'inquiétude de plusieurs villes de France. A la mairie de Nice, c'est l'incompréhension : selon l'INSEE, la ville aurait perdu 8 000 habitants en deux ans. Pourtant, les autres indicateurs (naissances, listes électorales et logements) semblent indiquer une population en hausse.
Idem à Nîmes qui refuse de croire qu'elle a perdu près de 4.000 habitants. Même ressenti à Toulouse, persuadé de vivre une explosion démographique toute relative d'après les chiffres officiels.
Mais selon François Clanché de l'Institut de la statistique, il n'y a pas lieu de remettre en cause cette technique. "Il faut bien voir que sur 36.700 communes, il n'y en a que quelques dizaines qui ont des reproches à faire. Et en général, les communes ce qu'elles nous reprochent c'est que leur population n'augmente pas ou pas assez. Ce qui les gêne, c'est surtout quand le chiffre ne va pas dans le sens qu'elles attendent. C'est-à-dire que la population augmente pour une raison économique mais aussi politique", a-t-il affirmé au micro d'Europe 1.
Car ces chiffres ont un impact direct sur les finances publiques. L'argent distribué par l'Etat est proportionnel aux résultats du recensement. Ces écarts agacent d'autant plus que les villes estiment qu'elles ne peuvent plus se fier aux chiffres officiels. Elles en ont pourtant besoin pour anticiper sur les constructions de logements, les infrastructures sportives ou même dans la gestion de leurs écoles.