Un "facteur d’apaisement". Le dernier rapport du contrôleur général des prisons Jean-Marie Delarue paraît mardi. Plusieurs mesures retiennent l’attention, notamment sa proposition d’autoriser l’usage des portables en milieu carcéral. Un "facteur d’apaisement" qui "éviterait d’épuiser les personnels à les chercher". Le portable cristallise en effet les tensions entre personnel pénitentiaire et détenus. Pour Jean-Marie Delarue, les autoriser serait donc un bon moyen de limiter les conflits. Signe de l’importance qu’il attache à cette mesure, c’est la deuxième fois qu’il l’inclut dans son rapport depuis 2011.
Aux Baumettes, 1700 détenus et 900 portables. L’interdiction du portable en prison est en effet toute théorique. En témoigne la fouille lancée par les gardiens de la prison des Baumettes à Marseille, qui avait permis de saisir près de 900 portables en 2013. Dans la prison d’Argentan, en décembre dernier, la confiscation d’une vingtaine de téléphones avait carrément provoqué une mutinerie chez les détenus.
Les surveillants craignent pour la sécurité des prisons. Malgré l’étendue actuelle du trafic de téléphones dans les prisons françaises, Jean-François Forget, du syndicat UFAP-UNSA Police, craint que les tentatives d’évasions explosent si les portables venaient à être autorisés en cellule : "Je prends l’évasion de Redouane Faïd, elle a été organisée de façon minutieuse avec le support de la téléphonie portable.L’organisation des jets de denrées, d’armes ou autres de l’extérieur vers l’intérieur des établissements fragilise la sécurité de nos établissements."
Un moyen de "mener des démarches". Loin des projets d’évasion et autres trafics en tout genres, Elsa Dujourdy, de l’OIP, estime que la réalité de l’usage des téléphones portable en prison est toute autre : "Nous, ce qu’on constate, c’est plutôt une utilisation du téléphone portable pour appeler les membres de la famille ou éventuellement mener des démarches, comme trouver un logement ou un employeur."
Un portable, plusieurs fonctions. Le portable est aussi un moyen pour les détenus de s’exprimer sur la place publique. Plusieurs vidéos de scènes de violences en prison ont été vues des milliers de fois sur le Net, comme celle tournée à Roanne, dans la Loire.
Les prisonniers frappés à la prison de Roannepar Spi0nToujours au chapitre de la violence, certains détenus utilisent également le portable pour continuer à faire pression sur des témoins gênants.
Contrôlé mais incontrôlable. Quelle que soit l’intention des pouvoirs publics, il semble de plus en plus compliqué d’empêcher les détenus d’utiliser le téléphone portable. Le modèle le plus répandu en prison, le Samsung M 300, contient assez peu de métal pour passer les portiques de sécurité sans encombre. Malgré les 400 brouilleurs installés ces dernières années, la courte portée de ces installations et les rapides évolutions technologiques permettent aux détenus de contourner l’obstacle.
Une législation mouvante selon les pays. Au Danemark, l’usage des portables est autorisé et encadré, les appels et les SMS sont surveillés régulièrement par l’administration pénitentiaire.
Le portable, une arme à double tranchant. Si le portable peut être utilisé à des fins illégales par les détenus, il peut aussi causer leur perte. Redouane Faïd, évadé grâce aux appels qu’il avait passés avec l’extérieur a été rattrapé… grâce à un portable placé discrètement dans sa voiture par un indic.
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