Ils sont là, en milieu d'après-midi sur le boulevard de Clichy, du côté ensoleillé du trottoir, ou aux alentours de la Tour Eiffel. Deux ou trois cartons empilés, un homme d'un côté et des joueurs de l'autre. C'est le bonneteau. La justice était appelée à se prononcer mercredi sur ce business clandestin. La cour d'appel de Paris a finalement condamné mercredi à six mois d'emprisonnement un homme qui tenait un jeu de bonneteau, écartant le chef d'escroquerie pour ne retenir que celui d'organisation de jeu de hasard sans autorisation.
En première instance, le tribunal correctionnel de Paris avait estimé qu'en organisant un jeu de bonneteau aux abords de la tour Eiffel, le prévenu s'était bien rendu coupable d'escroquerie et l'avait condamné à huit mois d'emprisonnement ferme.
Les règles du jeu. Le bonneteur va vite, très vite. Dans ses mains, trois cartes - deux figures noires et une rouge - ou trois palets - deux noirs, un blanc. Le but du jeu : retrouver la carte ou le palet unique. C'est parti :
• Vous passez devant le stand improvisé du bonneteur, des joueurs semblent être en veine - en fait ce sont des complices. Vous décidez de tenter aussi votre chance.
• Vous misez 20 euros
• Hop, hop, le bonneteur mélange les cartes ou les palets sous vos yeux, face retournée.
• Vous désignez une carte ou un palet. Gagné ? Vous doublez votre mise. Perdu ? Le bonneteur vous encourage à retenter votre chance.
Pendant ce temps, le ou les complices du bonneteur guettent l'arrivée éventuelle de la police. A peine un uniforme ou un gyrophare repéré, les cartes ou les palets sont rangés dans une poche, les billets dans une autre et un coup de pied fait disparaître la tour de cartons.
L'affaire. Leonard a été arrêté à la fin de l'année dernière, sur le quai Branly, à quelques mètres de la Tour Eiffel. Ce bonneteur était en train d'essayer de faire deviner à des touristes où était le bon palet. Interpellé puis jugé en comparution immédiate, il a été condamné à huit mois de prison à la fois pour avoir organisé un jeu de hasard dans la rue sans autorisation mais aussi pour escroquerie.
Le problème de droit. Or, "une escroquerie ne peut pas être un jeu de hasard", avait soulevé mercredi l'avocat du bonneteur, Me Helewa, dans les colonnes du Parisien. Et "pour établir l'escroquerie, il faut que le procureur prouve qu'il y a triche", avait-il ajouté. Les juges devaient donc choisir entre les deux infractions. D'autant qu'elles ne sont pas punies de la même façon : 6 mois de prison au maximum si les juges retiennent le jeu et cinq ans si c'est l'escroquerie. La cour d'appel de Paris donc tranché mercredi après-midi. Le bonneteau n'est pas une escroquerie, mais un jeu de hasard dans autorisation.