Avant-dernier jour de procès. Jeudi, les avocats de Michel Roussin et Rémy Chardon, deux anciens chefs de cabinets de Jacques Chirac, ont pris la parole au procès des emplois présumés fictifs de la mairie de Paris. L'avocat de l'ancien leader syndical Marc Blondel a également demandé la relaxe de son client.
17h41 : Me Haïk demande la relaxe de son client. "Je vous demande de mettre fin à ce parcours. La blessure n'est pas cicatrisée, elle est profonde. Je vous demande de restituer à ces hommes leur honneur qu'ils estiment avoir perdu depuis si longtemps. Vous pouvez être l'auteur de cette réhabilitation", conclut Me Haïk. L'audience est levée.
17h24 : "Cette procédure a buté à chaque pas sur des problèmes sérieux", regrette Me Haïk. Michel Roussin a été mis en examen à Nanterre et à Paris pour des faits similaires mais sur des chefs d'accusation différents, dénonce son avocat. "C'est un vrai problème", dit-il. Au bout du compte, Michel Roussin est renvoyé pour une autre qualification dans un des cas et a bénéficié d'un non-lieu dans l'autre. "On patauge, Monsieur le Président", lance Me Haïk. "Nous sommes en présence, dans un dossier unique, pour des faits identiques, de deux analyses diamétralement opposés", ajoute-t-il.
17h16 : "Le président Jacques Chirac n'est pas en mesure de se présenter devant vous mais nous aurions aimé qu'il soit là", dit Me Haïk, avant de lire un extrait de PV d'audition de l'ancien maire de Paris qui dédouane ses anciens directeurs de cabinet. "Bien sûr que si Jacques Chirac avait pu vous le dire de vive voix, cela aurait eu plus d'impact que ma simple lecture", regrette l'avocat.
17h10 : "Je ne peux pas esquiver l'absence d'accusation. Je devrais m'en réjouir car c'est déjà la fin de nos angoisses. Mais je n'arrive pas à me réjouir et j'ai le sentiment que cette relaxe sollicitée est susceptible de jouer contre nous. J'ai peur, Monsieur le Président", dit Me Haïk. "Comment faire, alors que les réquisitions à l'encontre de Michel Roussin sont justes et juridiquement bien fondées ?", poursuit-il. "On a mis en avant Michel Roussin pour en protéger d'autres", dénonce Me Haïk.
17h06 : Me Pierre Haïk, le second avocat de Michel Roussin, s'attache à démonter la procédure. "Il n'y a plus qu'une seule procédure, le dossier de Nanterre et le dossier de Paris ont été réunis. Mais comment peut-on accepter deux décisions diamétralement opposées dans une même procédure ?", demande-t-il.
17h04 : "Ces contrats n'ont jamais bénéficié à Michel Roussin. Y avait-il un cousin, un fils, un frère ? Non", martèle Me Laffont. "Le dossier de Nanterre et celui qui nous occupe sont strictement identiques", dit Me Laffont, or Michel Roussin a bénéficié d'un non-lieu à Nanterre.
16h53 : "Le directeur de cabinet ne peut pas avoir le moindre contrôle sur le suivi du contrat, l'effectivité du contrat", assure, elle aussi, Me Laffont. "A supposer qu'un contrat ait été fictif ou non conforme aux intérêts de la Ville, Michel Roussin ne pouvait pas le savoir. Tout le démontre et rien dans le dossier ne démontre le contraire", poursuit-elle.
16h42 : "C'est vrai qu'on a le sentiment d'être là par défaut", dit Me Laffont, appuyant les propos de son confrère Jean-Yves Le Borgne. "C'est la procédure qui était ainsi faite que la connaissance du directeur de cabinet sur le recrutement des chargés de mission était succinte", ajoute-t-elle. "Il n'a jamais été à l'initiative d'une quelconque embauche", souligne Me Laffont.
L'avocate ajoute que la plupart des dossiers visés dans la procédure ont été vidés - sans doute au moment du changement de majorité -, il manque beaucoup de pièces, notamment les demandes de recrutement. Le dossier de Jean-Claude Mestre est l'un des rares dossiers complets, "et tous les autres auraient dû être comme ça", note Me Laffont.
16h32 : "La présence de Michel Roussin a été parfois commode", dénonce son avocate. "Entre Jacques Chirac et Michel Roussin, on ne peut pas parler de proximité politique. Il y avait la cellule de Corrèze qui échappait totalement au directeur de cabinet, il y avait un secrétariat particulier, dont les courriers ne passaient pas par le cabinet...", ajoute Me Laffont. "Les fonctions même de directeur de cabinet impliquaient une neutralité politique, à laquelle Michel Roussin a toujours veillé", assure son avocate.
16h26 : "Pouvez-vous avoir la certitude, qu'il y a vingt ans, Michel Roussin savait qu'il apportait son concours à un contrat qui avait une autre finalité que celle indiquée ?", demande Me Laffont. "On part du postulat que Jacques Chirac aurait créé ces contrats de mission à des fins politiques et que le directeur de cabinet avait conscience que les contrats qu'il signait étaient dévoyés de leur but premier", poursuit l'avocate.
16h17 : "Il est toujours difficile de plaider après Jean-Yves Le Borgne. Aujourd'hui c'est presque impossible car il a tout plaidé et excellement plaidé", dit Jacqueline Laffont, l'une des avocates de Michel Roussin. "Aujourd'hui est un jour particulier, car c'est, nous l'espérons, la dernière fois que nous allons défendre Michel Roussin. Nous espérons qu'ensuite, il quittera ce statut de mis en examen qui ne l'a pas quitté depuis de nombreuses années", dit Me Laffont. "Vous jugez aujourd'hui un homme usé par un long parcours judiciaire. Mais nous défendons un homme debout", poursuit l'avocate.
"Il est difficile de faire la part des choses entre la vérité qui se colporte et la vérité judiciaire, celle qui est dans le dossier", dit Me Laffont. "Vous jugez Michel Roussin pour des faits qui ont vingt ans, sur la base d'un article que nous avons tous eu beaucoup de mal à retrouver", rappelle l'avocate.
15h50 : "Le réquisitoire du parquet me met mal à l'aise car il accrédite l'hypothèse d'un réquisitoire commandité par le pouvoir", dit Me Le Borgne, avant de demander la relaxe de son client. L'audience est suspendue une dizaine de minutes.
15h38 : Me Le Borgne évoque le cas particulier de François Debré. "Jacques Chirac a pris la responsabilité de l'embauche de François Debré. Que cette embauche soit préférentielle, bien sûr, qu'elle soit liée aux relations qu'entretenait Jacques Chirac avec la famille Debré, certainement. Mais ce n'était pas un emploi fictif. Il fallait lui trouver une vraie mission", assure le bâtonnier. "François Debré avait la compétence technique pour la mission qu'on lui a confiée", rappelle Me Le Borgne.
15h24 : "Qui c'est Madame Garnier-Bres ? Je l'aime bien Madame Garnier-Bres, parce qu'elle n'est personne. Elle n'est ni la soeur, ni l'épouse... Elle n'était même pas au RPR !", dit Me Le Borgne. "On oublie qu'on était 20 ans en arrière. Monsieur Musso demande une secrétaire pour taper le rapport. Oui, à l'époque, on ne tapait pas soi-même à la machine. Aujourd'hui les jeunes font ça très bien", ajoute-t-il.
"La faille technique a pu faire plus de tort que la complaisance", assure le bâtonnier. "Il y a une évidence d'absence de culpabilité", affirme Me Le Borgne.
15h19 : "Il faut remettre les choses dans leur contexte. Le recrutement des chargés de mission était banal. Et il était impossible de savoir par qui et pour faire quoi tel chargé de mission apparaissait dans le paysage. Quand le devenir des choses vous est inconnu, vous êtes bien en peine de vous saisir des choses pour exercer un quelconque contrôle", lance encore Me Le Borgne.
"Ce qui est regrettable, ce n'est pas que le directeur de cabinet ne soit pas au courant. Ce qui est regrettable c'est qu'il n'y ait pas de structure de contrôle du devenir de ces contrôles. Si on créait une telle autorité qui contrôlerait qui, dans la fonction publique travaille bien, qui arrive à l'heure le matin, on aurait du monde dans la rue !", dit le bâtonnier.
15h05 :"Si on avait su qui était le demandeur de l'emploi, serait-on allé voir le directeur de cabinet qui a signé mécaniquement ou celui qui a vraiment demandé un collaborateur ? Mais comme les fiches de demande de recrutements se sont envolées dans la nature, on n'a pas pu demander des comptes. Alors on s'est rabattu sur un responsable automatique. Pourquoi aller voir les directeurs de cabinet ? Parce qu'on a personne d'autre ! Ils sont là par défaut. Ils sont là pour assumer des responsabilités sur lesquelles on n'a pas pu mettre de nom", dit Me Le Borgne.
"Pour les contrats qu'il a signés et qu'on lui reproche, Rémy Chardon ne connaissait pas les chargés de mission. C'était un rôle purement formel", assure le bâtonnier. "Je rappelle que Rémy Chardon avait été mis en examen dans le volet de Nanterre, où il avait là aussi un certain nombre de choses, et qu'il a bénéficié d'un non-lieu, dit-il encore, avant de lire l'ordonnance de non-lieu prise par le juge d'instruction. "Il serait étrange de que les mêmes causes produisent un effet inverse. Cela n'a pas de sens", clame Me Le Borgne.
14h59 : "C'est quelqu'un qui demande qu'un chargé de mission lui soit attribué. Qui est ce quelqu'un, pourquoi demande-t-il un chargé de mission, Rémy Chardon n'en sait rien", assure Me Le Borgne. "Celui ou celle qui a contrat de chargé de mission doit rendre compte à celui ou celle qui l'emploie et non pas le maire de Paris ou son directeur de cabinet", indique le bâtonnier, citant un courrier d'un élu de l'opposition de la mairie de Paris. "Si le directeur de cabinet signe de façon mécanique, c'est qu'il respecte le secret voulu par l'élu. D'ailleurs le vrai demandeur de l'emploi ne figure pas dans le contrat", ajoute-t-il.
14h53 : "Faut-il faire des confidences sur soi-même quand on plaide ?", demande Me Le Borgne. "Quand j'ai pris mes fonctions à l'Ordre des avocats il y a deux ans, on m'a demandé de signer dans une grande machine effrayante. Aujourd'hui je vois passer des décisions, signées par ma signature électronique", raconte-t-il. "Pour le moment, je n'ai pas au de mauvaise surprise. Mais qui sait, un jour je me retrouverai peut-être devant votre tribunal."
"S'agissant de Rémy Chardon, il y aurait quelque curiosité à ce que ce pur produit de la République soit tout à coup attiré par les magouilles", lance Me Le Borgne. "Il n'a pas d'engagement politique, il est élu de nulle part, il n'était pas membre du RPR et ne l'est pas de l'UMP", continue-t-il.
14h44 : "La municipalité de Paris est une sorte d'immense bateau colossal dans lequel on se perd", dit Me Le Borgne. "Ces quatre contrats que l'on reproche à Rémy Chardon sont encore moins qu'une goutte d'eau et qu'il aurait sans doute oubliés si cette procédure ne les lui avait pas rappelés", assure le bâtonnier.
"Les contrats des chargés de mission, nous savons que c'est une vieille histoire. Ils existaient déjà avant qu'il y ait une mairie de Paris. Les directeurs de cabinet ont signé tous les contrats des chargés de mission, mais ils n'étaient pas tous, loin s'en faut, des contrats pour le cabinet du maire", rappelle Me Le Borgne. "La signature du directeur de cabinet n'est pas une manière d'avaliser" le recrutement, "c'était mécanique a rappelé Rémy Chardon", dit encore le bâtonnier.
14H35 : Me Jean-Yves Le Borgne, l'avocat de Rémy Chardon, est à la barre. "Je veux d'abord parler d'un grand absent dans ce procès. Non, je ne parlerai pas de Jacques Chirac. Mais d'un paradoxe bien français. On dit depuis longtemps que ce procès n'est pas un procès ordinaire. Mais nous sommes à la fois profondément monarchistes et profondément sans-culottes", dit-il de sa voix de stentor, avant de citer La Fontaine : "selon que vous êtes puissant ou faible, les jugements vous rendront blancs ou noirs".
"Il manquait un je-ne-sais-quoi de passion dans vore réquisitoire, comme si, comme vous n'êtes pas habitués à plaider l'innocence, cela s'étranglait dans votre gorge", lance Me Le Borgne aux deux représentants du parquet. "Résistez au populisme judiciaire", ajoute-t-il à l'intention des juges. "Je suis choqué qu'on en arrive à la supposition d'une innocence soit de la connivence politique", dit encore Me Le Borgne.
14h30 : "Tous les autres sont blanchis par le ministère public. Mais notre client est le seul mouton noir. Nous nous élevons contre cette anomalie pour tenter de vous faire rectifier" cette erreur, dit Me Pelletier. "Ce déshonneur, c'est une situation qu'il vit très mal", poursuit-il. "Nous demandons l'appréciation d'une justice normale et pas bienveillante. Nous sollicitons pour notre client qui a bien souffert la relaxe pure et simple", conclut Me Pelletier.
14h14 : Seconde plaidoirie pour la défense de Marc Blondel. "Pourquoi Marc Blondel est-il le mouton noir de ce dossier ? le seul contre lequel on réclame le principe d'une culpabilité", dit Me Pelletier. "Rien sur le plan du droit ne permet de dire que l'infraction est constituée", assure-t-il. "Marc Blondel est un homme d'honneur. Il comprendrait mal qu'on puisse douter de sa bonne foi, de son honnêteté et de sa respectabilité. Nous sommes ici pour redonner à Marc Blondel, l'honneur qu'on a tenté un instant de lui ôter", poursuit Me Pelletier. "Vous ne le condamnerez pas et vous lui rendrez la justice qu'il mérite", dit encore l'avocat.
14h06 : L'avocat termine sa plaidoirie en soulignant que Force ouvrière a remboursé 281.000 euros la Ville de Paris. "C'est un remboursement total, du premier au dernier jour du contrat de Monsieur Koté", précise Me Filior. "Parce qu'on rembourse, en mars 2003, cela voudrait dire qu'on était conscient de l'illicéité du contrat quatre ans plus tôt ?", demande l'avocat. "Comment Monsieur Blondel aurait-il su que l'emploi de Monsieur Koté provenait d'un délit ? Le magistrat instructeur ne le dit pas. C'est un mystère", relève Me Filior.
"Monsieur Blondel est meurtri et choqué par cette procédure, par ce procès d'intention qui lui est fait", dit Me Filior. "Mais je sais que le tribunal n'a pas pour habitude de rendre des jugements d'intention et que donc il relaxera Me Blondel", conclut-il.
13h58 : "La génèse de l'emploi de Mr Koté". "Le prédécesseur de Marc Blondel a été victime d'un attentat, on a fait sauter la porte de son appartement. Monsieur Blondel aurait pu bénéficier de la protection d'un ou de plusieurs policiers. Mais alors, la place Beauveau aurait été au courant tous ses faits et gestes dans le quart d'heure qui suit, ou même qui précède. Cela aurait été autant de la protection que de la surveillance. Monsieur Blondel ne l'a pas voulu", assure Me Filior. "Que ce soit dit une bonne fois pour toute à ceux qui l'ignorent, il n'y a pas de connivence politique entre Marc Blondel et Jacques Chirac", dit Me Filior.
13h50 : "Le syndicat FO aurait tout à fait pu rémunérer Monsieur Koté", dit Me Filior. "Mais Marc Blondel préférait exploiter au maximum les emplois mis à la disposition du syndicat", poursuit-il. "Certes ce détachement a été administrativement irrégulier, car la procédure n'a pas été respectée. Mais cela relève du droit administratif et aucune infraction pénale ne peut être relevée", note Gilbert Filior. "Pour qu'une infraction pénale puisse être relevée, il faut un élément intentionnel. Or l'instruction n'a pas établi que le recrutement avait été fait dans l'intention de détourner les règles", ajoute-t-il.
13h36 : L'audience est ouverte. Les débats de jeudi commencent avec la plaidoirie des avocats de Marc Blondel. "Marc Blondel m'a confié ne pas savoir ce qu'il faisait là. Je me pose la même question après le réquisitoire du parquet", dit Gilbert Filior, l'avocat du syndicaliste. "On dit que Marc Blondel aurait bénéficié d'un chauffeur. Mais Monsieur Koté n'avait pas le permis de conduire", note-t-il, provoquant des rires dans la salle.
"Il n'y a pas de détournement de fonds publics avec l'emploi de Monsieur Koté. La mise a disposition d'un agent de la ville au profit d'une organisation syndicale est prévue par une loi, deux décrets et expliquée par une circulaire", rappelle Me Filior. "On entend souvent dire que 'nul n'est censé ignorer la loi'. Que dire quand le magistrat instructeur ne connaît pas la loi ?", demande l'avocat.