Les "intrus" de la centrale nucléaire échappent pour l'instant à une sanction judiciaire. Mardi, le tribunal correctionnel de Troyes, dans l'Aube, s'est déclaré incompétent pour se prononcer sur les poursuites visant les neuf militants de Greenpeace qui s'étaient introduits en décembre 2011 dans la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine. Ils encouraient jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.
Changement de chef d'accusation
Les juges ont estimé que le délit n'était pas une "violation de domicile et locaux professionnels et dégradations en réunion" comme le soutenait le parquet, mais une intrusion sur un site relevant de la "défense nationale". Un chef d'accusation pour lequel seul le tribunal de Reims est régionalement compétent. Pour le parquet de Troyes, la qualification pénale relevait "d'un choix d'action publique. On a préféré retenir un texte générique comme on l'aurait fait pour toute autre installation industrielle sans retenir de spécificité particulière", s'est justifié Alex Perrin, procureur de la République de Troyes.
Un soulagement pour Greenpeace France qui y voit "un désaveu pour le parquet", précise Sophia Majnoni, porte-parole de l'organisation écologiste. Pour leur avocat, cette décision est légitime : "le tribunal a admis qu'on ne pouvait pas nous reprocher une violation de domicile passible de cinq ans de prison alors que tout autour de la centrale, il y a des panneaux indiquant que l'intrusion est interdite sous peine de six mois de prison et 7.500 euros d'amende selon l'article 413-7 du Code pénal", a souligné Alexandre Faro.
Toutefois, leur sort n'est pas réglé sur le plan judiciaire car un autre procès reste possible. Le parquet de Troyes a dix jours pour faire appel et trois ans pour requalifier les faits. "Le tribunal a renvoyé sa copie au procureur qui avait décidé d'élever les peines encourues pour probablement être plus dissuasif vis-à-vis des actions de ce genre", a poursuivi l'avocat.
"Elever le débat"
Le 5 décembre 2011 à l'aube, neuf activistes de Greenpeace avaient découpé les trois grillages de l'enceinte de la centrale de Nogent-sur-Seine avant de grimper sur le dôme d'un des deux réacteurs, pour tenter d'y peindre le symbole "danger". Leur objectif était de montrer les défaillances au sein des centrales. "Le tribunal a peut-être compris que cette action a été faite pour élever le débat sur la sécurité nucléaire en France et non pas pour dégrader", a déclaré Vivien Rabé, l'un des prévenus à l'issue de cette décision. Si celui-ci se dit "satisfait" de la décision, il affirme être "toujours dans l'attente", car un appel est envisageable.
Enfin, autre motif de satisfaction pour les accusés : les gardes à vue de trois des militants ont été déclarées irrégulières sur la forme par les juges.