LA LOI DU SILENCE. A l'intérieur du cercle familial, on savait. Il aura cependant fallu près de 20 ans pour briser la loi du silence imposée par le carcan de la famille. Un père de 59 ans et ses deux fils, âgés de 30 et 33 ans, sont jugés vendredi à Versailles pour des agressions sexuelles en série commises sur sept fillettes du cercle familial.
Romuald, Jean-François et Gilbert. Romuald, le père, et ses deux fils, Jean-François et Gilbert, sont poursuivis devant le tribunal correctionnel pour des faits d'attouchements et de corruption de mineurs commis sur cinq nièces et cousines, entre 1993 et 2013. Jean-François est en outre jugé le même jour pour des agressions sexuelles commises en mars 2013 sur ses propres filles, âgées de 3 et 6 ans.
Un divorce brise 20 ans de silence. C'est le divorce d'un des fils, Jean-François, qui fait éclater l'affaire, il y a un plus d'un an, en mars 2013. Son ex-compagne et mère de ses deux filles porte plainte à son encontre. Les fillettes disent avoir été agressées sexuellement par leur père pendant les vacances de Pâques, à son domicile de Loire-Atlantique.
La mère révèle alors aux gendarmes que trois autres membres de la famille lui ont confié avoir été victimes dans le passé d'attouchements de la part de Jean-François et de son père, Romuald. Dès lors, la parole se libère : une autre fille de la famille porte plainte contre Romuald, puis une seconde contre Gilbert.
"Chantage aux jouets" et caresses forcées. Dans les années 90, Mireille, l'épouse de Romuald et la mère des deux frères, depuis décédée, garde comme nourrice non déclarée de nombreuses petites filles à son domicile de Bonnières-sur-Seine, dans les Yvelines. Des nièces et des cousines lui sont également confiées. Ce sont aujourd'hui les seules à avoir dénoncé des abus. Sous ce toit, le "chantage aux jouets", les caresses forcées, et les menaces du martinet se répètent, selon l'accusation. Comble de l'horreur, Romuald, le "papi", se promène en peignoir et se masturbe devant des fillettes en regardant des films pornos". Gilbert plaque une petite fille contre le mur pour se caresser contre elle.
De son côté, Jean-François ne permet à une enfant de jouer aux Playmobil que si elle "se plaçait sur lui". Certaines des filles dorment dans sa chambre, alors qu'il est âgé d'une dizaine d'années. Jean-François leur impose des caresses, voire des viols répétés sur l'une d'elles. "La perversité et la déviance sexuelles étaient omniprésentes dans ce cadre familial", remarque une source proche de l'affaire, soulignant un "manque d'éducation".
Tous trois récemment condamnés. Les deux frères ont déjà été condamnés le 1er avril dernier par le tribunal pour enfants de Versailles pour des agressions sexuelles. Ces faits ont été commis entre leurs 13 et 18 ans, sur certaines nièces et cousines. Jean-François a écopé de trois ans de prison ferme, notamment pour des viols sur sa cousine par alliance. L'homme a fait appel. Son frère, Gilbert, déficient mental, a quant à lui été condamné à 8 mois avec sursis. Un an plus tôt, c'est leur père qui avait été condamné à deux ans avec sursis pour avoir agressé en 2012 ses petites-filles.
Jean-François, le "plus pervers", minimise les faits. Jean-François, "plus pervers" que les autres, selon une victime, minimise les faits, tout en reconnaissant avoir eu des moments d'excitation au contact de ces enfants. "Mais cela ne fait pas de lui un prédateur", soutient son avocat Me Denis Solanet. Le conseil note par ailleurs que "les agressions sexuelles cessent pendant 13 ans à partir du moment où il quitte le domicile de son père". Le frère et le père ont reconnu leurs actes, ce dernier admettant "avoir un problème avec les petites filles". Des petites filles, dont certaines qui devenues femmes, ont connu tentative de suicide, dépression, problèmes sexuels.