Complice, mentor, soutien ? Le profil d'Abdelkader Merah, le frère du "tueur au scooter", reste flou. L'homme âgé de 29 ans a été entendu lundi après-midi sur son rôle présumé dans l'aide logistique à la préparation des tueries de Mohamed Merah et sur son influence dans la radicalisation de son frère. L'occasion pour Europe1.fr de revenir sur le profil de son frère.
Un parcours de délinquant patenté
Mineur, il est interpellé à de multiples reprises pour des affaires de violence et de stupéfiants, rapporte Le Parisien. Adulte, il finit par trouver un travail de peintre en bâtiment. Une fois marié, il continue "ses conneries". "C’était un gars du quartier : il buvait, il fumait, il volait, il faisait des conneries", reconnaît Yamina, son épouse, devant les enquêteurs. En 2006, il entame un virage islamiste et fait la rencontre d'un certain Sabri Essid, figure de la nébuleuse toulousaine djihadiste.
Dès 2007, Abdelkader Merah fait l'objet d'une surveillance et de plusieurs notes de la DCRI. Il est décrit par les membres comme un proche du "groupe de Toulouse", des salafistes arrêtés en 2007 et condamnés en 2009 pour avoir développé une filière de candidats au djihad. Selon les enquêteurs, Abdelkader a effectué de nombreux voyages en Egypte en coordination avec un des principaux mis en examen de la filière islamiste toulousaine, Sabri Essid, le fils du compagnon de sa mère. En 2010, il a en effet séjourné quatre mois en Égypte pour suivre un enseignement religieux axé sur le djihad. La, il a appris l'arabe dans une école coranique, se laissant pousser la barbe et les cheveux.
A l'origine de la radicalisation de son frère ?
Durant ses séjours en Égypte, Abdelkader Merah entretenait "des contacts téléphoniques réguliers avec son frère", précise un rapport de la DCRI déclassifié en août dernier par le ministère de l’Intérieur. Mohamed Merah lui a même rendu visite un mois en Égypte.
"Abdelkader Merah est à l'origine de la radicalisation de son frère, sur lequel il exerce une forte influence depuis l'enfance. Il lui a apporté un soutien logistique dans son entreprise criminelle et a, peut-être, été l'inspirateur de ses actions", en concluent les policiers de la sous-direction antiterroriste, dans un rapport daté du 25 mars. Des propos confirmé par Abdelghani Merah, le frère aîné de Mohamed. Selon lui, Abdelkader a "pris en main Mohamed" et lui a "inculqué le radicalisme".
>>> Lire "Je n’ai pas réussi à protéger Mohamed".
Des frères proches au moment des tueries
Les enquêteurs manquent toutefois de preuves matérielles et d'aveux pour attester l'implication d'Abdelkader Merah dans les tueries de Toulouse et Montauban. Longtemps brouillés, Mohamed et son frère se sont rapprochés durant le dernier mois précédant les tueries.
Il était notamment présent lors du vol du scooter qui a servi à Mohamed Merah lors des tueries. Il a également reconnu avoir assisté à l'achat du blouson porté par son frère au moment des tueries. Les enquêteurs le soupçonnent d'avoir encore acquis le casque du tueur au scooter. En garde à vue, il a assuré que ces équipements étaient destinés à sa femme, mais les enquêteurs n'en sont pas du tout convaincus.
Autre fait troublant : le jour de la tuerie de Montauban et la veille des assassinats dans l'école juive, les deux frères ont dîné ensemble, rapporte L'Express. Au cours de sa garde à vue, le frère aîné a expliqué qu'il avait renoué le dialogue avec Mohamed un mois avant les tueries : "Deux ou trois jours après notre réconciliation, il m'a reparlé du djihad, lui voulait bouger rapidement, trouver un filon rapidement ou faire des coups en France ou à l'étranger". Abdelkader aurait alors décliné l'invitation. "Je n'étais pas encore à son niveau", a-t-il expliqué aux enquêteurs.
Des propos confirmés par Mohamed Merah le jour de la négociation avec le Raid. Tout au long de cette discussion, le terroriste a toujours pris soin d'assurer qu'aucun membre de sa famille n'était avisé de ses plans.
Abdelkader fier de son frère
Poursuivi pour complicité d'assassinats, association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme et pour vol en réunion d'un scooter Abdelkader "conteste totalement la complicité d'assassinats, qui ne repose sur aucun élément objectif", a dit son avocat, Me Eric Dupond-Moretti.
Abdelkader Merah se dit toutefois fier de son frère, mort les armes à la main. C'est selon lui le rêve de tous musulmans d'être tué par ses ennemis. Dans une interview au Point, le frère aîné des Merah, avait contredit les propos d'Abdelkader. "Il faut insister sur le fait que tous ne pensent pas comme mon frère. Beaucoup de musulmans aiment les juifs. Je veux montrer au monde entier qu’on ne doit pas faire d’amalgame", juge-t-il.