LE CLAN. Avec 22 personnes à la barre, c'est le procès de tout un clan qui s'est ouvert lundi au tribunal correctionnel de Paris pour "association de malfaiteurs", "traite d'êtres humains" ou encore "viols en réunion". Celui du réseau "Hamidovic", une famille qui exploitait des adolescents, majoritairement des jeunes filles, originaires de Bosnie-Herzégovine, contraints de faire les poches des passagers du métro parisien. Pour les enquêteurs, ces adolescentes font ainsi bien plus figures de victimes que de coupables.
Des ados qui subissent… Bien que contraintes, ces jeunes filles se reconnaissent difficilement comme victimes dans cette affaire, comme a pu le constater Morgane Siri, psychologue au sein de l'association Hors la Rue, qui, à l'époque des faits, allait à leur rencontre. "Une jeune fille avait subi des violences et avait été placée en foyer. Lorsque nous lui avons rendu visite, elle nous a suppliés de l'aider à fuir du foyer, et à l'aider à retrouver son groupe", se souvient-elle au micro d'Europe 1. "Lorsqu'on lui a signifié qu'elle venait de subir de la violence de la part de quelqu'un de son groupe, elle nous a dit que c'était normal. Nous étions vraiment désarçonnés, on ne savait plus quoi faire".
Pour cette psychologue, les jeunes exploités par le réseau étaient destitués de leur "identité propre: ils sont réduits à l'état d'objet, ils sont aliénés". Un exemple : "nous avons demandé à la jeune fille qui s'était fait agresser si elle faisait confiance à quelqu'un. Elle nous a dit que non, à personne, à personne au sein de son groupe de cousins cousines, parce qu'ils s'appellent cousin, cousine entre eux. C'est un autre monde", estime la psy.
…mais bel et bien victimes. Pour le commissaire Thierry Boulouque, chef de la Brigade de protection des mineurs à la PJ parisienne, ces adolescentes sont de "de vraies victimes parce qu'elles sont exploitées au quotidien". "Leur seule possibilité de vivre, c'est de voler dans le métro", précise-t-il ajoutant qu'elles sont de plus "victimes de sévices, de violences et d'actes de barbarie". Et le policier décrit le même monde parallèle : "je ne pense pas qu'elles aient des rêves. Leur seul espoir c'est de monter en grade, de devenir chef de clan intermédiaire, organisateur ".
Le témoignage qui a aidé l'enquête. L'une de ces jeunes filles, victime de viol, a tout de même fini par parler. C'est son témoignage qui a aidé la police à dresser l'organigramme du clan. Depuis, personne ne sait ce qu'elle est devenue. Les "Hamidovic" qui représentaient à l'époque des faits 70% des vols dans le métro ont été remplacées par d'autres jeunes voleurs, venus souvent de Roumanie.