La France ne respecte pas ses obligations à l'égard des autistes. Le Conseil de l'Europe l'a condamné publiquement mercredi, et ce pour la deuxième fois. L'institution, qui rassemble 47 Etats européens, accuse Paris de ne rien faire pour scolariser les enfants autistes. "Il y a violation de la Charte sociale européenne" en la matière a conclu le Conseil, dans une décision qu'a pu consulter Europe1. Cette condamnation oblige l’État français à rendre compte des avancées en la matière.
Quel est le problème ? Selon l'association "Vaincre l'autisme", 80% des enfants autistes ne vont pas à l'école. Dans l'Hexagone, ils sont davantage orientés vers les hôpitaux que les bancs scolaires. "Il y a une exception française : les parents sont dans la précarité. Ils vont jusqu'à prendre des crédits, pour aller chercher du personnel étranger et éduquer leur enfant", regrette ainsi M'Hammed Sajidi, président de cette association, au micro d'Europe1.
"J'ai dû partir en Israël pour me former et m'occuper de mon fils. En France, la place d'un autiste est à l'hôpital, avec des neuroleptiques, et pas à l'école. En France, mon fils ne parlait jamais. En une semaine à l'étranger, il s'est mis à parler, à dire 'je t'aime'", témoigne aussi sur Europe 1 Olivia Cattan, mère d'un autiste de huit ans et auteure du livre D'un Monde à l'autre, Autisme, le combat d'une mère.
" Carlotti ne fait pas grand-chose". Le Conseil de l'Europe accuse aussi l'Etat français de "contribuer financièrement au déplacement en Belgique des enfants et adolescents autistes de nationalité française", au lieu d'investir en France pour les familles qui n'ont pas les moyens de se déplacer.
Selon Olivia Cattan, Marie-Arlette Carlotti, la ministre déléguée au handicap, "ne fait pas grand-chose, elle ne comprend rien, elle ne répond pas aux familles, ne s'y intéresse pas et c'est grave ". "J'accuse la France de maltraitance. Les enfants autistes n'ont pas le même droit d'aller à l'école que les autres. Il n'y a pas d'auxiliaires de vie scolaire assez bien formée. À la place, il y a un système mafieux, de psychiatres qui nous renvoient vers des auxiliaires qu'il faut payer", renchérit-elle.
L’État n'a-t-il vraiment rien fait ? La France a déjà lancé trois "Plans autisme" depuis 2005. Et pour cause : elle avait déjà été condamnée, à cette date, par le Conseil de l'Europe. Le dernier plan date de 2013. "Nous avons donc fait le choix d'un investissement massif dans la formation et le renforcement des dispositifs en psychologues et en éducateurs spécialisés. Les formations rendront compte de la complexité de l'autisme et de la variété des approches existantes", promettait alors Marie-Arlette Carlotti, débloquant 250 millions d'euros.
Mais pour le Conseil de l'Europe, cette somme est trop faible. Et surtout, le lancement d'un troisième plan alors que les deux autres n'était pas encore complètement effectifs a retardé les résultats. "Après une période d'inaction programmatique de trois ans, ce plan repousse la réalisation des objectifs nouvellement assignés jusqu'en 2017. Ce plan est déraisonnable", peut-on lire dans la décision de mercredi.
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